Vendredi, nous
fêterons la Toussaint ,
la solennité annuelle qui célèbre tous les saints et saintes, tous ceux qui sont rendus au but, qui sont
rendus dans la Patrie
céleste.
Un de mes
paroissiens est venu me voir dernièrement et m’a appris qu’il avait deux livres
de chevet : la Bible et Les Fables de La Fontaine. J’ai
trouvé cela intéressant. La Bible nous présente l’idéal à suivre dans nos
comportements moraux et les fables de La Fontaine nous présentent de façon
imagée les qualités et les défauts inhérents à nos comportements humains. À ce
qu’on raconte, monsieur de La Fontaine n’a pas mené une vie très vertueuse.
C’est dommage, car ses fables nous offrent de très belles pistes pouvant nous
conduire à la vertu.
Je ne sais pas
pourquoi je pense déjà à la solennité de tous les saints, communément appelée
« La Toussaint ». Cette
fête n’aura pourtant lieu que dans trois jours (1) . Et, comme pour me préparer à la
fête du premier novembre, j’ai à l’esprit, depuis ce matin, la fable hyper
connue de La Fontaine, intitulée : Le lièvre et la tortue.
Le Lièvre et la Tortue
Rien ne sert de courir ; il faut partir à
point.
Le Lièvre et la Tortue en sont un témoignage.
Gageons, dit celle-ci, que vous n'atteindrez point
Sitôt que moi ce but. - Sitôt ? Êtes-vous sage ?
Repartit l'animal léger.
Ma commère, il vous faut purger
Avec quatre grains d'ellébore.
- Sage ou non, je parie encore.
Ainsi fut fait : et de tous deux
On mit près du but les enjeux :
Savoir quoi, ce n'est pas l'affaire,
Ni de quel juge l'on convint.
Notre Lièvre n'avait que quatre pas à faire ;
J'entends de ceux qu'il fait lorsque prêt d'être atteint
Il s'éloigne des chiens, les renvoie aux Calendes,
Et leur fait arpenter les landes.
Ayant, dis-je, du temps de reste pour brouter,
Pour dormir, et pour écouter
D'où vient le vent, il laisse la Tortue
Aller son train de Sénateur.
Elle part, elle s'évertue ;
Elle se hâte avec lenteur.
Lui cependant méprise une telle victoire,
Tient la gageure à peu de gloire,
Croit qu'il y va de son honneur
De partir tard. Il broute, il se repose,
Il s'amuse à toute autre chose
Qu'à la gageure. A la fin quand il vit
Que l'autre touchait presque au bout de la carrière,
Il partit comme un trait ; mais les élans qu'il fit
Furent vains : la Tortue arriva la première.
Eh bien ! lui cria-t-elle, avais-je pas raison ?
De quoi vous sert votre vitesse ?
Moi, l'emporter ! et que serait-ce
Si vous portiez une maison ?
Le Lièvre et la Tortue en sont un témoignage.
Gageons, dit celle-ci, que vous n'atteindrez point
Sitôt que moi ce but. - Sitôt ? Êtes-vous sage ?
Repartit l'animal léger.
Ma commère, il vous faut purger
Avec quatre grains d'ellébore.
- Sage ou non, je parie encore.
Ainsi fut fait : et de tous deux
On mit près du but les enjeux :
Savoir quoi, ce n'est pas l'affaire,
Ni de quel juge l'on convint.
Notre Lièvre n'avait que quatre pas à faire ;
J'entends de ceux qu'il fait lorsque prêt d'être atteint
Il s'éloigne des chiens, les renvoie aux Calendes,
Et leur fait arpenter les landes.
Ayant, dis-je, du temps de reste pour brouter,
Pour dormir, et pour écouter
D'où vient le vent, il laisse la Tortue
Aller son train de Sénateur.
Elle part, elle s'évertue ;
Elle se hâte avec lenteur.
Lui cependant méprise une telle victoire,
Tient la gageure à peu de gloire,
Croit qu'il y va de son honneur
De partir tard. Il broute, il se repose,
Il s'amuse à toute autre chose
Qu'à la gageure. A la fin quand il vit
Que l'autre touchait presque au bout de la carrière,
Il partit comme un trait ; mais les élans qu'il fit
Furent vains : la Tortue arriva la première.
Eh bien ! lui cria-t-elle, avais-je pas raison ?
De quoi vous sert votre vitesse ?
Moi, l'emporter ! et que serait-ce
Si vous portiez une maison ?
Quel lien
peut-on faire entre cette fable de La Fontaine et la fête de la
Toussaint ? Pour répondre à cette question, je n’ai qu’à me poser une
autre question : « Quelle est
la réalité ou la vérité qui me touche le plus dans la fête de la
Toussaint » ? À cette question, la réponse qui me vient
immédiatement à l’esprit, est celle-ci : « Tous
ces bienheureux ont atteint leur but ; ils ont atteint le but pour lequel
ils étaient créés ». J’ai été jeter un coup d’œil sur le texte que j’ai écrit
il y a deux ans sur mon blogue (le 1er
novembre 2011) et j’ai constaté que les premières lignes étaient les
suivantes : « Aujourd’hui l’Église est en fête; nous célébrons la
Toussaint. Nous célébrons tous les saints et toutes les saintes; ceux et celles
qui ont atteint le but. Comme ils sont chanceux d’avoir atteint le but pour
lequel ils ont été créés : voir Dieu face à face et aimer comme Lui leurs
frères et sœurs. »
Pour
retracer cette citation, j’ai été consulter mon blogue et j’ai eu la grande
joie de constater que le texte le plus lu sur mon blogue aujourd’hui, est
précisément ce texte du 1er novembre 2011. Cela veut dire que la
fête de la Toussaint revêt une importance particulière pour les croyants. Comme
il est beau qu’il en soit ainsi !
Mais
revenons au lien qu’il y a entre la fable du lièvre et de la tortue et la
solennité de la Toussaint. Le lièvre a perdu la course, a perdu le pari, parce
qu’il a oublié le but. Il connaissait très bien le but, mais il jugeait qu’il
avait amplement le temps de l’atteindre. Oubliant le but, ou le perdant de vue,
il s’est mis à jouir du temps qui lui était donné, pour se divertir, se reposer
et « jouir de la vie ».
Jusqu’à ce qu’il soit trop tard. Voilà une belle image de l’être humain de tous
les temps, et particulièrement de l’homme et de la femme modernes. Pas si
modernes que cela, à vrai dire, car « le
pain et les jeux » ont toujours exercé un grand attrait sur les gens.
La
fable de La Fontaine nous présente une course. C’est en quelque sorte une
course contre la montre. Or la vie est exactement cela : une course, et
une course contre la montre. Parfois le temps semble passer si lentement, que
nous croyons que nous avons tout notre temps pour penser à la mort et à
l’au-delà. Et soudain, on se réveille et on s’aperçoit qu’on a soixante-deux
ans (comme moi en ce moment). Un de
nos acteurs québécois disait récemment à la télévision, qu’il trouvait la vie
très courte : « À peine
commençons-nous à comprendre la vie, à avoir un peu d’expérience concernant les
choses de la vie, qu’il est presque temps de quitter ce monde »,
disait-il. Quand réaliserons-nous que la vie humaine est une course, une course
contre la montre ? Et que peu importe si parfois la vie nous semble
longue, elle est en fait, très courte.
Saint Paul avait très bien compris cela, et il n’a pas hésité une minute à
comparer la vie à une course. Il est d’ailleurs intéressant de constater qu’en
français, le mot « course » est très semblable au mot
« court ». Dans sa lettre
aux Philippiens, saint Paul nous dit :
« Certes, je ne suis pas encore au but, je ne suis pas encore devenu parfait, mais je poursuis
ma course pour saisir tout cela, comme j'ai moi-même été saisi par le Christ
Jésus. Frères, je ne pense pas avoir déjà
saisi. Une seule chose compte : oubliant ce qui est en arrière, je vais droit de l'avant, tendu de tout mon être, et je cours vers le but, en vue du prix que Dieu nous appelle à recevoir là-haut, dans le Christ Jésus. » (Ph 3, 12 –14)
Gardons les yeux sur le
but; gardons les yeux sur Jésus.
JOYEUSE
SOLENNITÉ DE TOUS LES SAINTS !!!!
(1) Peut-être est-ce ma chère maman, Carmen, qui m'inspire de vous écrire ces lignes dès aujourd'hui. Ma mère est décédée il y a huit ans aujourd'hui, le 29 octobre 2005, presque à l'heure qu'il est en ce moment au Canada, alors que je vous écris ces lignes. Je pense sincèrement que c'est ma mère qui est responsable du fait qu'en ce jour, je sois aussi "attiré vers le haut ". D'ailleurs, les funérailles de ma chère maman ont eu lieu le jour de la Toussaint 2005. Encore un peu de patience, chère mère, et bientôt nous nous retrouverons et nous nous réjouirons ensemble d'avoir atteint le but pour lequel nous avons été créés par amour.