Saint Bernard et les plaies du
Seigneur
Saint Bernard de Clairvaux
Je trouve tellement belle l’homélie de saint Bernard
qu’on nous présente la deuxième lecture de l’office des lectures d’aujourd’hui
(mercredi de la troisième semaine), que je désire vous la partager :
HOMélie DE SAINT BERNARD SUR LE CANTIQUE DES CANTIQUES
Là
où le péché s'était multiplié, la grâce a surabondé
Où
donc notre fragilité peut-elle trouver repos et sécurité, sinon dans les plaies
du Sauveur ? Je m'y sens d'autant plus protégé que son salut est plus puissant.
L'univers chancelle, le corps pèse de tout son poids, le diable tend ses pièges
: je ne tombe pas, car je suis campé sur un roc solide. J'ai commis quelque
grave péché : ma conscience se trouble, mais elle ne perd pas courage, puisque
je me souviens des plaies du Seigneur, qui a été transpercé à cause de
mes fautes. Rien n'est à ce point voué à la mort que la mort du Christ ne
puisse le libérer. Dès que je pense à cette médecine si forte et efficace, la
pire des maladies ne m'effraie plus.
Il
se trompait donc, celui qui a dit : Mon péché est trop grand pour que
j'en obtienne pardon. Il est vrai qu'il n'était pas un membre du Christ, et
que les mérites du Christ ne le concernaient pas ; il n'avait pas le droit de
les revendiquer pour lui, comme un membre peut dire siens les biens de la tête.
Pour
moi, ce qui me manque par ma faute, je le tire hardiment des entrailles du
Seigneur, car la miséricorde y abonde, et elles sont percées d'assez de plaies
pour que l'effusion se produise. Ils ont percé ses mains, ses pieds, et d'un
coup de lance son côté. Par ces trous béants, je puis goûter le miel de
ce roc et l'huile qui coule de la pierre très dure, c'est-à-dire goûter et
voir combien le Seigneur est bon. Il formait des pensées de paix et
je ne le savais pas. Qui, en effet, a connu la pensée du Seigneur ? Qui
a été son conseiller ? Mais le clou qui pénètre en lui est devenu pour
moi une clef qui m'ouvre le mystère de ses desseins. Comment ne pas voir à
travers ces ouvertures ? Les clous et les plaies crient que vraiment, en la
personne du Christ, Dieu se réconcilie le monde. Le fer a transpercé
son être et touché son cœur afin qu'il n'ignore plus comment compatir
à mes faiblesses.
Le
secret de son cœur paraît à nu dans les plaies de son corps ; on voit à
découvert le grand mystère de sa bonté, cette miséricordieuse tendresse
de notre Dieu, Soleil levant qui nous a visités d'en haut. Et comment cette
tendresse ne serait-elle pas manifeste dans ses plaies ? Comment montrer plus
clairement que par tes plaies que toi, Seigneur, tu es doux et
compatissant et d'une grande miséricorde, puisqu'il n'est pas de plus grand
amour que de donner sa vie pour des condamnés à mort ?
Tout
mon mérite, c'est connaître la pitié du Seigneur, et je ne manquerai pas de
mérite tant que la pitié ne lui fera pas défaut. Si les miséricordes de Dieu se
multiplient, mes mérites seront nombreux, Mais qu'arrivera-t-il, si j'ai à me
reprocher quantité de fautes ? Là où le péché s'était multiplié la
grâce a surabondé. Et si la bonté du Seigneur s'étend de toujours à
toujours, de mon côté je chanterai sans fin les miséricordes du
Seigneur. Est-ce là ma justice ? Seigneur, je ferai mémoire de ta seule
justice, car c'est elle qui est devenue ma justice, puisque pour moi tu es
devenu justice de Dieu.
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