mercredi 16 janvier 2019

Le ministère de l'écoute

Le ministère de l’écoute
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"Dans la capacité d’écoute se trouve la racine de la paix." (Pape François)


De l’évangile selon saint Luc chapitre 10, versets 38-42

Chemin faisant, Jésus entra dans un village. Une femme nommée Marthe le reçut. Elle avait une sœur appelée Marie qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole. Quant à Marthe, elle était accaparée par les multiples occupations du service. Elle intervint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien que ma sœur m’ait laissé faire seule le service ? Dis-lui donc de m’aider. » Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu te donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée. » (Lc 10, 38-42)

Le mot “ ministère ” tel que je l’entends ici, vient du mot grec « DIAKONIA » qui veut dire: « service de ceux qui répondent aux besoins des autres ». Dans le texte ci-dessus, le mot grec pour décrire " les multiples occupations du service " faites par Marthe pour accueillir Jésus, est le mot: DIAKONIA. Le but du présent blogue est de montrer que le " ministère de l'écoute " est un des plus grands services que l'on puisse rendre à notre prochain. 
  
Dans un épisode de l’évangile une personne aveugle entend un bruit de foule et demande ce qui se passe. On lui répond que c’est Jésus qui passe sur ce chemin. L’aveugle crie à Jésus : « Fils de David, Jésus, prends pitié de moi ». Et Jésus lui demande : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » Il me semble que ce que veut cet aveugle est évident. La personne aveugle répond : « Rabbouni, que je retrouve la vue » (Mc 10, 46-52). Jésus considérait qu'il était important que l’aveugle exprime son besoin. Et qui sait? Son besoin le plus grand aurait pu être autre chose que son besoin évident. On se met trop souvent dans la tête des autres. Si on laisse les gens nous exprimer leur besoin, on risque d’être surpris et surtout on risque moins de se tromper sur ce qui est le plus important pour eux.

Vous vous êtes sûrement posé à quelques reprises la question suivante : « Pourquoi les petits-enfants aiment-ils autant leurs grands-parents ? » À cette question, il peut y avoir de multiples réponses. Une de ces réponses est sûrement celle-ci : parce que les petits enfants vivent souvent des moments de qualité avec leurs grand-parents; et ces moments de qualité passent souvent par l’écoute. Les petits enfants, très souvent, aiment à se confier à leurs grands-parents; ils découvrent dans leur papi et mamie une écoute attentive qui ne les juge pas et qui leur fait du bien. Ils bénéficient aussi souvent de conseils de ces personnes qui les aiment et qui ont beaucoup plus d'expérience qu'eux.

Un de mes confrères Oblats de la Vierge Marie a travaillé durant des années à Boston, dans notre chapelle qui est située dans un des gratte-ciels de Boston: le « Prudential Center ». Ce confrère souffre d’une maladie qui faisait en sorte que pendant longtemps il ne pouvait pas prêcher et même confesser. Cependant, parmi les lettres qu'à la chapelle on reçoit à chaque jour, c’est à lui qu’allait, de loin, la plus grande quantité de remerciements. Pourquoi? En raison d’une simple question que mon confrère posait aux gens. Les gens qui venaient à la chapelle était souvent des inconnus. Le Père Bob (c’est son prénom) faisait connaissance avec eux et leur posait cette simple question : « Est-ce qu’il y a une intention pour laquelle vous aimeriez que je prie pour vous? ». Cette question toute simple, conduisait à de très profondes et sérieuses confidences. Les gens ont besoin de faire sortir d’eux ce qui les préoccupe, de s’exprimer, de se confier. Il est vrai que le fait d'être prêtre favorise de telles confidences. Mais si la personne sait que nous sommes croyants et qu'elle sente notre bienveillance à son égard, il est fort possible qu'elle s'ouvre à nous sur des sujets importants et délicats pour elle. Du moins, cela n'est pas impossible. Si nous avons la chance de côtoyer régulièrement une personne et de lui témoigner notre amour de diverses façons, il est très probable qu'elle nous ouvrira un jour la porte de son coeur et que nous pourrons y déposer la Bonne Nouvelle qu'est Jésus. Mais cela se fait avec le temps. Il est bon toutefois de se convaincre que le but ultime de toute rencontre, c'est de permettre à l'autre de s'ouvrir, de se révéler. 

Comment se fait-il que j’écrive ce blogue aujourd’hui ? C’est en raison d’une vidéo que je viens de visionner. Vous trouverez cette vidéo au bas du présent blogue (1). La vidéo nous présente le témoignage de monsieur René Baillargeon, âgé de 80 ans. Je vous encourage fortement à regarder cette vidéo. Les passages qui m'ont le plus marqué sont ceux où M. Baillargeon parle de l'écoute. Cet homme, très humble, nous apprend qu'il est très volubile, qu'il aime beaucoup parler. Son épouse Angéline avec qui il a eu cinq enfants, lui a dit au lendemain de leur mariage: « Toi, tu t’occuperas de la prière. Car tu es plus placoteux ». Un des derniers enseignements qu'il ait reçu de son épouse avant qu'elle ne décède, est celui-ci: 

« Angéline est morte du cancer. Je l'ai accompagné jusqu'à la fin. En fin de vie, elle perdait sa parole. Et puis là, tout énervé, je lui disais: « Veux-tu de l'eau, veux-tu ceci, veux-tu cela ? » Et elle me dit: « René, ÉCOUTE, ÉCOUTE , ÉCOUTE ! ». Aïe, c'est une leçon, n'est-ce pas ? Mais je l'oublie encore. Je parle beaucoup plus que je n'écoute. Mais souvent cela me vient comme un écho: « ÉCOUTE, ÉCOUTE ! »

Il y a une vérité dont je me rends compte seulement depuis quelque temps. Chacun de nous veut une vie riche en expériences. On veut tous être riches intérieurement. Mais comment enrichit-on notre intérieur ? " EN ÉCOUTANT ". Quand je parle, je dis des choses que je sais déjà, que j'ai apprises soit de Dieu, soit des autres, soit des événements, grâce à l'écoute. Mais quand j'écoute, j'apprends des choses, j'apprends du nouveau. Par conséquent, si je veux grandir en humanité je me dois d'écouter. Le " ministère de l'écoute ", c'est d'abord à moi que cela profite. Plus j'écouterai, plus je serai riche intérieurement, plus je serai humain. 

Toute la doctrine de l'accompagnement spirituel, qu'on appelait auparavant la " direction spirituelle ", repose sur l'écoute. Quand une personne se révèle à nous, en nous parlant longuement de sa vie, elle reçoit normalement de grandes lumières pendant cette révélation d'elle-même; elle reçoit des lumières uniquement par le fait de se révéler. 

Tout chrétien doit être un être d'écoute. C'est seulement à cette condition que nous permettrons aux gens de se rapprocher de Dieu. 

Voici, en terminant, quelques commentaires du pape François sur l'évangile de Marthe et Marie

« L'hôte ne doit pas simplement être servi, nourri, soigné de toutes les façons possibles. Il faut surtout qu’il soit écouté. Rappelez-vous bien de ce mot: écouter! Car l’hôte doit être accueilli comme une personne, avec son histoire, son cœur riche de sentiments et de pensées, afin qu’il puisse se sentir vraiment en famille. Mais si tu accueilles un hôte chez toi et que tu continues à t’affairer, que tu le fais asseoir là, lui muet et toi muet, c’est comme s’il était de pierre: l’hôte de pierre. Non. L’hôte doit être écouté. … Si nous allons prier — par exemple — devant le Crucifix, et que nous parlons, parlons, parlons et puis nous nous en allons, nous n’écoutons pas Jésus! Nous ne le laissons pas parler à notre cœur. Écouter: voilà le mot-clé. N’oubliez pas! Et nous ne devons pas oublier que dans la maison de Marthe et Marie, Jésus, avant d’être Seigneur et Maître, est pèlerin et hôte. Donc, sa réponse a ce sens premier et plus immédiat : « Marthe, Marthe, pourquoi te donnes-tu tant de peine pour l’hôte jusqu’à oublier sa présence? » — L’hôte de pierre! — Pour l’accueillir, il n’est pas nécessaire de faire beaucoup de choses; au contraire, une seule chose est nécessaire : l’écouter — c’est le mot: l’écouter —, faire preuve à son égard d’une attitude fraternelle, de façon qu’il se sente en famille, et non dans un refuge provisoire ». … Et je voudrais vous demander, vous poser une question, à laquelle chacun répondra dans son cœur: toi, mari, as-tu du temps pour écouter ta femme? Et toi, femme, as-tu du temps pour écouter ton mari? Vous, parents, avez-vous du temps, du temps à « perdre », pour écouter vos enfants? Ou vos grands-parents, les personnes âgées? — « Mais les grands-parents disent toujours les mêmes choses, ils sont ennuyeux... » — mais ils ont besoin d’être écoutés!  Écouter. Je vous demande d’apprendre à écouter et d’y consacrer plus de temps. Dans la capacité d’écoute se trouve la racine de la paix.

Que la Vierge Marie, Mère de l’écoute et du service attentionné, nous enseigne à être accueillants et hospitaliers envers nos frères et nos sœurs. » (Pape François, Angelus du dimanche 17 juillet 2016)


(1)
 Vivre avec le Christ - René Baillargeon - YouTube

8 janv. 2019 - Téléversé par Webtélé ECDQ
À 80 ans, René Baillargeon est à l'âge de, comme il le dit lui-même, transmettre sa joie de vivre ...



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