Le ministère de l’écoute
"Dans la capacité d’écoute se trouve la racine de la paix." (Pape François)
De l’évangile selon saint Luc
chapitre 10, versets 38-42
Chemin faisant, Jésus entra dans un village. Une femme nommée
Marthe le reçut. Elle avait une sœur appelée Marie qui, s’étant assise aux pieds du
Seigneur, écoutait sa parole. Quant à Marthe, elle était accaparée par les multiples occupations
du service. Elle intervint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien
que ma sœur m’ait laissé faire seule le service ? Dis-lui donc de
m’aider. » Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu te
donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, elle
ne lui sera pas enlevée. » (Lc 10, 38-42)
Le mot “ ministère ” tel que je l’entends ici, vient du
mot grec « DIAKONIA » qui veut dire: « service de ceux qui répondent aux besoins
des autres ». Dans le texte ci-dessus, le mot grec pour décrire " les multiples occupations du service " faites par Marthe pour accueillir Jésus, est le mot: DIAKONIA. Le but du présent blogue est de montrer que le " ministère de l'écoute " est un des plus grands services que l'on puisse rendre à notre prochain.
Dans un épisode de l’évangile une personne aveugle entend un bruit
de foule et demande ce qui se passe. On lui répond que c’est Jésus qui passe
sur ce chemin. L’aveugle crie à Jésus : « Fils de David, Jésus, prends pitié de moi ». Et Jésus lui
demande : « Que veux-tu que je
fasse pour toi ? » Il me semble que ce que veut cet aveugle est
évident. La personne aveugle répond : « Rabbouni, que je retrouve la vue » (Mc 10, 46-52). Jésus considérait qu'il était important que l’aveugle exprime son besoin. Et qui sait?
Son besoin le plus grand aurait pu être autre chose que son besoin évident. On
se met trop souvent dans la tête des autres. Si on laisse les gens nous
exprimer leur besoin, on risque d’être surpris et surtout on risque moins de se tromper sur ce qui est le plus important pour eux.
Vous vous êtes sûrement posé à quelques reprises la
question suivante : « Pourquoi les petits-enfants aiment-ils autant leurs grands-parents
? » À cette question, il peut y avoir de multiples réponses. Une de
ces réponses est sûrement celle-ci : parce que les petits enfants vivent
souvent des moments de qualité avec leurs grand-parents; et ces moments de qualité passent souvent par l’écoute.
Les petits enfants, très souvent, aiment à se confier à leurs grands-parents;
ils découvrent dans leur papi et mamie
une écoute attentive qui ne les juge pas et qui leur fait du bien. Ils bénéficient
aussi souvent de conseils de ces personnes qui les aiment et qui ont beaucoup plus d'expérience qu'eux.
Un de mes confrères Oblats de la Vierge Marie a travaillé durant des années à Boston,
dans notre chapelle qui est située dans un des gratte-ciels de Boston: le
« Prudential Center ». Ce
confrère souffre d’une maladie qui faisait en sorte que pendant longtemps il ne
pouvait pas prêcher et même confesser. Cependant, parmi les lettres qu'à la chapelle on reçoit à chaque jour, c’est à lui qu’allait, de loin, la plus
grande quantité de remerciements. Pourquoi? En raison d’une simple question que
mon confrère posait aux gens. Les gens qui venaient à la chapelle était souvent
des inconnus. Le Père Bob (c’est son prénom) faisait connaissance avec eux et
leur posait cette simple question : « Est-ce qu’il y a une intention
pour laquelle vous aimeriez que je prie pour vous? ». Cette question toute
simple, conduisait à de très profondes et sérieuses confidences. Les gens ont
besoin de faire sortir d’eux ce qui les préoccupe, de s’exprimer, de se confier. Il est vrai que le fait d'être prêtre favorise de telles confidences. Mais si la personne sait que nous sommes croyants et qu'elle sente notre bienveillance à son égard, il est fort possible qu'elle s'ouvre à nous sur des sujets importants et délicats pour elle. Du moins, cela n'est pas impossible. Si nous avons la chance de côtoyer régulièrement une personne et de lui témoigner notre amour de diverses façons, il est très probable qu'elle nous ouvrira un jour la porte de son coeur et que nous pourrons y déposer la Bonne Nouvelle qu'est Jésus. Mais cela se fait avec le temps. Il est bon toutefois de se convaincre que le but ultime de toute rencontre, c'est de permettre à l'autre de s'ouvrir, de se révéler.
Comment se fait-il que j’écrive ce blogue aujourd’hui
? C’est en raison d’une vidéo que je viens de visionner. Vous trouverez cette vidéo au bas du présent blogue (1). La vidéo nous présente le témoignage de monsieur René Baillargeon, âgé de 80 ans. Je vous encourage fortement à regarder cette vidéo. Les passages qui m'ont le plus marqué sont ceux où M. Baillargeon parle de l'écoute. Cet homme, très humble, nous apprend qu'il est très volubile, qu'il aime beaucoup parler. Son épouse Angéline avec qui il a eu cinq enfants, lui a dit au lendemain de leur mariage: « Toi, tu t’occuperas de la prière. Car tu es
plus placoteux ». Un des derniers enseignements qu'il ait reçu de son épouse avant qu'elle ne décède, est celui-ci:
« Angéline est morte du cancer. Je l'ai accompagné jusqu'à la fin. En fin de vie, elle perdait sa parole. Et puis là, tout énervé, je lui disais: « Veux-tu de l'eau, veux-tu ceci, veux-tu cela ? » Et elle me dit: « René, ÉCOUTE, ÉCOUTE , ÉCOUTE ! ». Aïe, c'est une leçon, n'est-ce pas ? Mais je l'oublie encore. Je parle beaucoup plus que je n'écoute. Mais souvent cela me vient comme un écho: « ÉCOUTE, ÉCOUTE ! »
Il y a une vérité dont je me rends compte seulement depuis quelque temps. Chacun de nous veut une vie riche en expériences. On veut tous être riches intérieurement. Mais comment enrichit-on notre intérieur ? " EN ÉCOUTANT ". Quand je parle, je dis des choses que je sais déjà, que j'ai apprises soit de Dieu, soit des autres, soit des événements, grâce à l'écoute. Mais quand j'écoute, j'apprends des choses, j'apprends du nouveau. Par conséquent, si je veux grandir en humanité je me dois d'écouter. Le " ministère de l'écoute ", c'est d'abord à moi que cela profite. Plus j'écouterai, plus je serai riche intérieurement, plus je serai humain.
Toute la doctrine de l'accompagnement spirituel, qu'on appelait auparavant la " direction spirituelle ", repose sur l'écoute. Quand une personne se révèle à nous, en nous parlant longuement de sa vie, elle reçoit normalement de grandes lumières pendant cette révélation d'elle-même; elle reçoit des lumières uniquement par le fait de se révéler.
Tout chrétien doit être un être d'écoute. C'est seulement à cette condition que nous permettrons aux gens de se rapprocher de Dieu.
Voici, en terminant, quelques commentaires du pape François sur l'évangile de Marthe et Marie:
« L'hôte ne doit pas simplement être
servi, nourri, soigné de toutes les façons possibles. Il faut surtout qu’il
soit écouté. Rappelez-vous bien de ce mot: écouter! Car l’hôte doit être
accueilli comme une personne, avec son histoire, son cœur riche de sentiments
et de pensées, afin qu’il puisse se sentir vraiment en famille. Mais si tu
accueilles un hôte chez toi et que tu continues à t’affairer, que tu le fais
asseoir là, lui muet et toi muet, c’est comme s’il était de pierre: l’hôte de
pierre. Non. L’hôte doit être écouté. … Si nous allons prier — par exemple —
devant le Crucifix, et que nous parlons, parlons, parlons et puis nous nous en
allons, nous n’écoutons pas Jésus! Nous ne le laissons pas parler à notre cœur.
Écouter: voilà le mot-clé. N’oubliez pas! Et nous ne devons pas oublier que
dans la maison de Marthe et Marie, Jésus, avant d’être Seigneur et Maître, est
pèlerin et hôte. Donc, sa réponse a ce sens premier et plus immédiat : « Marthe, Marthe, pourquoi te donnes-tu tant
de peine pour l’hôte jusqu’à oublier sa présence? » — L’hôte de
pierre! — Pour l’accueillir, il n’est pas nécessaire de faire beaucoup de
choses; au contraire, une seule chose est nécessaire : l’écouter — c’est le
mot: l’écouter —, faire preuve à son égard d’une attitude fraternelle, de façon
qu’il se sente en famille, et non dans un refuge provisoire ». … Et je voudrais
vous demander, vous poser une question, à laquelle chacun répondra dans son
cœur: toi, mari, as-tu du temps pour écouter ta femme? Et toi, femme,
as-tu du temps pour écouter ton mari? Vous, parents, avez-vous du temps, du
temps à « perdre », pour écouter vos enfants? Ou vos grands-parents, les
personnes âgées? — « Mais les grands-parents disent toujours les mêmes choses,
ils sont ennuyeux... » — mais ils ont besoin d’être écoutés! Écouter. Je
vous demande d’apprendre à écouter et d’y consacrer plus de temps. Dans la
capacité d’écoute se trouve la racine de la paix.
Que la Vierge Marie, Mère de
l’écoute et du service attentionné, nous enseigne à être accueillants et
hospitaliers envers nos frères et nos sœurs. » (Pape François, Angelus du dimanche 17 juillet 2016)
(1) Vivre avec le Christ - René Baillargeon - YouTube
8 janv. 2019 - Téléversé par Webtélé ECDQ
À 80 ans, René Baillargeon est à l'âge de, comme il le dit lui-même, transmettre sa joie de vivre! ...
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