mercredi 18 juillet 2018

"Parrêsia": un don à demander


« Parrêsia »: un don à demander
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Que demander à l’Esprit Saint pour les chrétiens de notre temps? À cette question, plusieurs réponses sont possibles. Aujourd’hui, en ce 18 juillet 2018, j’ai le goût de lui demander de mettre en nous la « parrêsia » qu’il a si abondamment déversée dans le cœur des disciples de Jésus au lendemain de la Pentecôte. Le mot grec « parrêsia » peut se traduire par « audace ». Puisque la parrêsia est un don extraordinaire donné par l’Esprit Saint, il n’est pas étonnant de retrouver ce mot dans le livre des Actes des Apôtres, qui nous rapportent les « actions » posées par les apôtres et les premiers chrétiens au lendemain de la Pentecôte. Le mot « parrêsia » est d’ailleurs l’avant-dernier mot du livre des Actes des apôtres. Ce livre magnifique de la Bible, se termine par quelques lignes concernant le héros principal de ces pages écrites par saint Luc: saint Paul:  

30 Paul demeura deux années entières dans le logement qu’il avait loué ; il accueillait tous ceux qui venaient chez lui ;
31 il annonçait le règne de Dieu et il enseignait ce qui concerne le Seigneur Jésus Christ avec une entière assurance et sans obstacle. (Ac 28, 30-31)

31
κηρύσσων τὴν βασιλείαν τοῦ θεοῦ, καὶ διδάσκων τὰ περὶ τοῦ κυρίου Ἰησοῦ χριστοῦ, μετὰ πάσης παρρησίας, ἀκωλύτως.
prêchant le royaume de Dieu, et enseignant les choses qui regardent le Seigneur Jésus-Christ, avec toute liberté, et sans être empêché.


"Parrêsia, un mot de la Bible dont la palette des sens est très riche, et auquel peuvent correspondre plusieurs traductions en français. Au point de départ de ce mot, il y a la confiance, qui peut, soit rester une conviction intime, soit s’extérioriser dans le débat public sous la forme de la franchise, de la liberté de parole, de l’assurance, et même de la hardiesse. Avec toutes ces résonnances, le mot parrêsia est donc difficile à traduire et peu repérable dans les traductions françaises du Nouveau Testament.

Un mot de la Bible par Norbert ADELINE ...

C’est le mot assurance que nous allons privilégier dans notre présentation pour traduire parrêsia, mais n’oublions pas les autres valeurs de la parrêsia, dans le champ de la droiture, de la simplicité et de l’enthousiasme. Tel apparaît ce mot parrêsia dont le champ de significations est vaste et qui a une résonnance toute particulière dans le texte biblique.

Nous associerons évidemment au nom parrêsia le verbe parrêsiazomai qui lui correspond, et qui signifie donc « se conduire avec assurance ».

Dans le Nouveau Testament, les attestations de ces deux mots sont nombreuses: parrêsia et parrêsiazomai se rencontrent une quarantaine de fois et nous noterons que la répartition de ces attestations est irrégulière. Aucun emploi chez Matthieu. Un seul emploi chez Marc. Mais des emplois dans l’Evangile selon Jean et le reste dans les Actes et les Épitres. Rien d’étonnant à ce qu’on rencontre souvent, dans les textes centraux de la proclamation apostolique, un mot qui exprime l’assurance et la force de la conviction."(1)

Pourquoi est-ce que je vous parle de « parrêsia » aujourd’hui? C’est parce que je suis en train de lire l’exhortation apostolique « Soyez dans la joie et l’allégresse » (« Gaudete et exultate ») du pape François sur « l’appel à la sainteté dans le monde actuel ». Aux numéros 129 à 133, le pape nous parle explicitement de la « parrêsia » :

Audace et ferveur

129. En même temps, la sainteté est parresía : elle est audace, elle est une incitation à l’évangélisation qui laisse une marque dans ce monde. Pour que cela soit possible, Jésus lui-même vient à notre rencontre et nous répète avec sérénité et fermeté : « Soyez sans crainte » (Mc 6, 50). « Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20). Ces paroles nous permettent de marcher et de servir dans cette attitude pleine de courage que suscitait l’Esprit Saint chez les Apôtres et qui les conduisait à annoncer Jésus-Christ. Audace, enthousiasme, parler en toute liberté, ferveur apostolique, tout cela est compris dans le vocable parresía, terme par lequel la Bible désigne également la liberté d’une existence qui est ouverte, parce qu’elle se trouve disponible à Dieu et aux autres (cf. Ac 4, 29 ; 9, 28 ; 28, 31 ; 2 Co 3, 12 ; Ep 3, 12 ; He 3, 6 ; 10, 19).

130. Le bienheureux Paul VI mentionnait parmi les obstacles à l’évangélisation précisément le manque de parresía : « Le manque de ferveur […] est d’autant plus grave qu’il vient du dedans »[103](NDLR: le pape cite ici l'exhortation apostolique "Evangelii nuntiandi "de Paul VI)

132. La parresía est un sceau de l’Esprit, une marque de l’authenticité de l’annonce. Elle est l’assurance heureuse qui nous conduit à trouver notre gloire dans l’Évangile que nous annonçons, elle est confiance inébranlable dans la fidélité du Témoin fidèle qui nous donne l’assurance que rien « ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu » (Rm 8, 39).

133. Nous avons besoin de l’impulsion de l’Esprit pour ne pas être paralysés par la peur et par le calcul, pour ne pas nous habituer à ne marcher que dans des périmètres sûrs. Souvenons-nous que ce qui est renfermé finit par sentir l’humidité et par nous rendre malades. Quand les Apôtres ont senti la tentation de se laisser paralyser par les craintes et les dangers, ils se sont mis à prier ensemble en demandant la parresía : « À présent donc, Seigneur, considère leurs menaces et [permets] à tes serviteurs d’annoncer ta parole en toute assurance » (Ac 4, 29). Et la réponse a été que « tandis qu’ils priaient, l’endroit où ils se trouvaient réunis trembla ; tous furent alors remplis du Saint Esprit et se mirent à annoncer la parole de Dieu avec assurance » (Ac 4, 31). (2)

En Actes 4, 29 et 31, le mot grec « parrêsia » est traduit par « assurance » :

29
Καὶ τὰ νῦν, κύριε, ἔπιδε ἐπὶ τὰς ἀπειλὰς αὐτῶν, καὶ δὸς τοῖς δούλοις σου μετὰ παρρησίας πάσης λαλεῖν τὸν λόγον σου,
Et maintenant, Seigneur, regarde leurs menaces, et donne à tes serviteurs d'annoncer ta parole avec toute assurance,

31
Καὶ δεηθέντων αὐτῶν ἐσαλεύθη ὁ τόπος ἐν ᾧ ἦσαν συνηγμένοι, καὶ ἐπλήσθησαν ἅπαντες πνεύματος (πνεύματος ἁγίου  τοῦ ἁγίου πνεύματος)ἁγίου, καὶ ἐλάλουν τὸν λόγον τοῦ θεοῦ μετὰ παρρησίας.
Lorsqu'ils eurent prié, le lieu où ils étaient assemblés trembla, et ils furent tous remplis de l'Esprit saint ; et ils annonçaient avec assurance la parole de Dieu.

Puisque le pape fait explicitement mention de l’exhortation apostolique « L’évangélisation dans le monde moderne » (Evangelii nuntiandi) du pape Paul VI, je terminerai ce blogue en citant cet important document: 
  
"Il se serait pas inutile que chaque chrétien et chaque évangélisateur approfondisse dans la prière cette pensée : les hommes pourront se sauver aussi par d’autres chemins, grâce à la miséricorde de Dieu, même si nous ne leur annonçons pas l’Évangile ; mais nous, pouvons-nous nous sauver si par négligence, par peur, par honte — ce que saint Paul appelait “ rougir de l’Évangile ”[134] — ou par suite d’idées fausses nous omettons de l’annoncer ? Car ce serait alors trahir l’appel de Dieu qui, par la voix des ministres de l’Évangile, veut faire germer la semence ; et il dépendra de nous que celle-ci devienne un arbre et produise tout son fruit.

Gardons donc la ferveur de l’esprit. Gardons la douce et réconfortante joie d’évangéliser, même lorsque c’est dans les larmes qu’il faut semer. Que ce soit pour nous — comme pour Jean-Baptiste, pour Pierre et Paul, pour les autres Apôtres, pour une multitude d’admirables évangélisateurs tout au long de l’histoire de l’Église — un élan intérieur que personne ni rien ne saurait éteindre. Que ce soit la grande joie de nos vies données. Et que le monde de notre temps qui cherche, tantôt dans l’angoisse, tantôt dans l’espérance, puisse recevoir la Bonne Nouvelle, non d’évangélisateurs tristes et découragés, impatients ou anxieux, mais de ministres de l’Évangile dont la vie rayonne de ferveur, qui ont les premiers reçus en eux la joie du Christ, et qui acceptent de jouer leur vie pour que le Royaume soit annoncé et l’Église implantée au coeur du monde. (Evangelli nuntiandi, no. 80) 

(3)


Si j'étais marié et si j'avais une fille, je serais tenté de lui donner comme nom: Parrêsia. Je sais très bien que normalement un catholique devrait donner à ses enfants le nom d'un saint ou d'une sainte. Mais Jésus n'a-t-il pas changer le nom de Simon pour le nom de "Pierre" (car Pierre vient de"pierre") pour rappeler au chef des apôtres que sa foi doit toujours demeurer solide? De même, si j'avais une fille et que je la nommais Parrêsia, ce serait pour qu'elle se rappelle et pour que je me rappelle que nous devons toujours témoigner hardiment de l'évangile.

Aujourd'hui, au moment de l'intercession aux vêpres du mercredi de la troisième semaine, nous avons prié ainsi: 

" Ô Christ, tu envoies des disciples préparer la route devant toi; 
- donne-leur d'annoncer l'Évangile avec assurance, par la force de ton Esprit."


biblique.blogspirit.com/archive/2006/12/09/parresia-esperance.html

(2) Gaudete et exsultate: Exhortation apostolique sur l'appel à la sainteté ...

w2.vatican.va/.../papa-francesco_esortazione-ap_20180319_gaudete-et-exsultate.html

(3) Evangelii nuntiandi (8 décembre 1975) | Paul VI

w2.vatican.va/content/paul-vi/fr/.../hf_p-vi_exh_19751208_evangelii-nuntiandi.html, no. 80.




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