mercredi 17 avril 2024

Kateri Tekakwitha et l’offrande du corps

 Kateri Tekakwitha et l’offrande du corps

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Sainte Kateri Tekakwitha 1656 -1680
 
Note: J'aime beaucoup cette peinture de Kateri parce que l'artiste n'a pas voulu cacher les marques qu'a laissées la vérole sur le visage et le corps de la sainte. Mais cela n'enlève rien au fait que Kateri irradie la bonté et la joie. On raconte que quinze minutes après la mort de Kateri, son visage est devenu magnifique, et ne portait plus aucune marque. Je ne serais pas surpris que ce soit vrai car un phénomène semblable s'est produit chez d'autres saints. 

Aujourd’hui, l’Église du Canada fête une de ses saintes, Kateri Tekakwitha, celle qu’on a appelle le « Lys des Agniers ». Les Agniers, que l’on nomme maintenant les Mohawks, sont l’une des six nations iroquoises. Kateri est la première Autochtone d'Amérique du Nord à être canonisée par l'Église catholique. 

Kateri est née en 1656 dans le village agnier d'Ossernenon, aujourd'hui Auriesville dans l'État de New-York. Dix ans avant la naissance de Kateri, le Père Jésuite Isaac Jogues, un des huit martyrs canadiens ou nord-américains, avait fondé dans le village Mohawk d'Ossernenon, sur les rives de la rivière Mohawk, la mission Sainte-Trinité. C'est à cet endroit que trois de nos martyrs canadiens furent martyriser par les agniers (Iroquois): René Goupil, en 1642, Isaac Jogues et Jean de Lalande en 1646. Les Pères Jésuites sont d'ailleurs les instruments que Dieu a choisis pour accompagner la jeune Kateri sur le chemin de la sainteté.  

Le père de Kateri était chef de tribu, Lors d'une expédition guerrière à Trois-Rivières (dans le Canada actuel) il a fait prisonniers des Algonquins et les a emmenés à Ossernenon. Parmi les prisonniers, il choisit pour épouse une Algonquine déjà baptisée catholique, qui deviendra la mère de Kateri. Kateri n'est pas le nom d'origine de notre chère sainte. Dans la tribu Mohawk où a grandi Kateri, on lui avait donné le surnom de Tekakwitha, qui signifie: celle qui avance en tâtonnant. Ce surnom est dû à une épidémie de vérole qui a frappé la communauté d'Ossernenon. Les parents de Kateri en sont morts ainsi que son jeune frère. Kateri a survécu mais portera toute sa vie les séquelles de cette terrible maladie; elle souffrira toute sa vie d'une grave maladie des yeux qui l'empêchera de supporter la lumière du jour et elle aura le visage "grêlé". Après la mort de ses parents, Kateri fut accueillie par un oncle et élevée par des tantes. C'est son oncle et ses tantes qui ont surnommé la jeune indienne: Tekakwitha. 

En 1666, suite à une expédition française contre les Agniers, la tribu à laquelle appartenait Kateri déménagea sur l'autre rive de la rivière Mohawk, sur un nouveau site appelé: Caughnawaga (Kahnawaké). C'est là que Kateri rencontrera pour la première fois les missionnaires Jésuites. Elle est frappée par leurs manières affables et par leur piété. Grâce à eux elle apprendra à connaître Jésus et Marie dont sa mère lui avait déjà parlé. Kateri est fortement attirée par le Dieu des chrétiens.  

Sa vie 

Elle doit subir les heurts de sa famille lorsqu'elle refuse l'époux qu'on lui propose. Quand le jésuite Jacques de Lamberville lui rend visite à l'automne 1675, elle demande le baptême. Après un catéchuménat de six mois, elle est baptisée le jour de Pâques 1676 sous le nom de Kateri. Pendant plus d'un an, sa famille continue de la persécuter et la prive de nourriture parce qu'elle ne veut pas travailler le dimanche. On lui lance des pierres quand elle se rend à la chapelle pour prier et une de ses tantes l'accuse même d'avoir une liaison avec son oncle. Le Père de Lamberville lui conseille alors d'aller vivre à la mission Saint-François-Xavier, sur la rive sud du Saint-Laurent, en face de Montréal.

Dans ce village, elle retrouve d'autres chrétiens et les Jésuites qu'elle avait rencontrés en 1666. Kateri fait sa première communion le jour de Noël 1677. Elle passe des heures en prière à la chapelle. Durant la chasse d'hiver, elle continue ses exercices de piété tout en se livrant aux travaux communs, et se fait un oratoire d'une croix taillée dans un arbre, près d'un ruisseau.  

D'autres épreuves fondent sur elle quand elle est accusée d'avoir couché avec l'époux d'une Indienne et que ses parents veulent la forcer à se marier. Elle ne peut réaliser son désir de fonder une communauté de religieuses autochtones, mais elle fait voeu de chasteté le 25 mars 1679. Accablée de migraines, d'une fièvre lente et d'un grand mal d'estomac, elle meurt le 17 avril 1680, à l'âge de 24 ans. Elle a été béatifiée par le pape Jean-Paul II le 22 juin 1980.  

 Sa spiritualité

Lorsqu'elle se rend à la mission Saint-François -Xavier, le Père de Lamberville la recommande à son confrère en ces termes: "Je vous envoie un trésor, gardez-le bien."


La direction spirituelle de Kateri est confiée au Père Cholenec qui ne tarde pas à l'admettre à la première communion. Elle manifeste une véritable faim de l'eucharistie et veut s'unir plus intimement aux souffrances du Christ. Son biographe, le Père Chauchetière, dira que la devise de toute sa vie était: "Qui est-ce qui m'apprendra ce qu'il y a de plus agréable à Dieu afin que je le fasse?" L'église devient presque sa demeure. Elle y arrive à quatre heures du matin, assiste à la première messe de l'aube et à une autre au lever du soleil. On la retrouve devant le tabernacle plusieurs fois par jour et le soir pour la prière commune. 


Ardente priante, elle développe une vie intérieure dont l'élan d'amour trouve à s'exprimer avec les autres. Elle prie pour que son peuple accueille la Bonne Nouvelle de l'Amour qui la fait vivre, jeûne et se livre même à des actes de mortification excessifs qu'elle abandonne rapidement sur l'avis de son directeur spirituel. 


Une visite aux Hospitalières de l'Hôtel-Dieu de Montréal lui inspire le désir de se consacrer à Dieu. Avec son amie Marie-Thérèse Tegaiaguenta et la huronne Skarikions, elle veut fonder un monastère à l'Île aux Hérons. Ce projet n'a pas de suite, mais elle fait voeu de chasteté: "La chose était si nouvelle, écrit le Père Cholenec, que je crus ne devoir rien précipiter ( ... ) après avoir examiné sa conduite et les grands progrès qu'elle faisait en toute sorte de vertus et surtout avec combien de profusion Dieu se communiquait à sa servante, il me sembla que ce dessein de Kateri ne pouvait venir que de lui." (1)


Kateri est le nom qui fut donné à notre chère sainte, le jour de son baptême. Ce nom lui a été donné en l'honneur de sainte Catherine de Sienne. Kateri fut canonisée par le pape Benoît XVI, le 21 octobre 2012. 


Remarques personnelles: 


Ce qui me frappe le plus dans la spiritualité de Kateri, c'est son rapport au corps. Cette jeune amérindienne a souffert dans son corps toute sa vie, spécialement en raison de la vérole dont elle a été victime étant toute jeune. Mais Kateri s'est aussi imposer beaucoup de pénitences corporelles. Cette façon de traiter son corps n'est plus recommandable de nos jours. L'Église ne prône plus cela. Mais il semble que cette façon très dure de traiter son corps, était chose assez courante chez les autochtones du 17e siècle. Une chose est certaine, Kateri a voulu participer au plus haut point aux souffrances du Christ. 

La messe en honneur de cette chère sainte, nous propose comme première lecture le début du chapitre 12 de la Lettre de saint Paul aux Romains. C'est un texte que je connais par coeur et que j'aime beaucoup. Jusqu'à maintenant, la traduction que je connaissais, était la suivante: 

Je vous exhorte, mes frères, par la tendresse de Dieu, à lui offrir votre personne et votre vie en sacrifice saint, capable de plaire à Dieu: c'est là pour vous l'adoration véritable. " (Rm 12, 1)

Or ce matin à la messe, j'ai lu et entendu pour la première fois la nouvelle traduction du lectionnaire (2) et j'ai été rempli d'étonnement: 

Je vous exhorte donc, frères, par la tendresse de Dieu, à lui présenter votre corps - votre personne tout entière - en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu: c'est là pour vous, la juste manière de lui rendre un culte." (Rm 12, 1) (voir aussi: https://www.aelf.org/bible/Rm/12)

Il est évident dans ce texte, que le mot "corps" est synonyme de "personne". Mais il est très intéressant de voir cette insistance mise sur le mot "corps". 

Kateri a fait le voeu de virginité le 25 mars 1679, un an avant sa mort, en la fête de l'Annonciation du Seigneur ou de l'Incarnation. Dans la liturgie de la solennité de l'Annonciation, je trouve frappant et étonnant que l'on mette dans la bouche de Jésus, les phrases suivantes de la Lettre aux Hébreux : 

En entrant dans le monde, le Christ dit: "Tu n'as voulu ni sacrifice ni offrande, mais tu m'as formé un corps. Tu n'as pas agréé les holocaustes ni les sacrifices pour le péché; alors j'ai dit: Me voici, je suis venu, mon Dieu, pour faire ta volonté." (He 10, 5)

Et Jésus a dit à la dernière Cène et dit à chaque messe: "Prenez, et mangez, ceci est mon corps, livré pour vous."

Oui, écoutons Dieu qui nous dit: " Glorifiez Dieu dans votre corps " (1 Co 6, 20). 

SAINTE KATERI TEKAKWITHA, PRIEZ POUR NOUS !!!!!


(1) Recueil de célébrations des saints et saintes, bienheureux et bienheureuses du Canada --- Sainte Kateri Tekakwitha, Concanan Inc., 1990, pp. 12 et 13.   

(2) AELF — Bible

https://www.aelf.org/bible







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Photo: Sanctuaire de sainte Kateri Tekakwitha à Kanhawake, sur la rive sud de Montréal. J'aime beaucoup la chapelle (ou l'église) que vous voyez sur la photo ci-dessus. C'est à cet endroit que l'on peut vénérer les restes de la dépouille mortelle de Kateri. Cette chapelle est très ignatienne. Les statues en bois qui sont au mur dans le choeur, représentent deux saints Jésuites: la statue à droite représente saint Ignace de Loyola, le fondateur de la Compagnie de Jésus (les Jésuites), et la statue à gauche représente saint François Xavier brandissant le crucifix, patron de la Mission qui a accueilli Kateri dans l'actuelle province de Québec et le patron des missions dans l'Église catholique.  


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