La grâce avant les œuvres
Ce matin, je me suis décidé à
écrire un blogue sur les magnifiques pages que j’ai lues en fin d’année
dernière de la plume et du cœur d’un auteur que j’aime beaucoup: le Père
Raniero Cantalamessa. J’ai décidé de donner comme titre à ce blogue, les mots
suivants: « La grâce avant les
œuvres ». Or voici que je reçois ce matin un mot d’un de mes confrères
québécois qui vit en France. Il m’a envoyé les mots suivants, après avoir lu
mon dernier blogue intitulé: « Mon
Dieu bénissez la nouvelle année » :
Merci, Guy.
Merci, Guy.
Tout
est grâce en effet, même notre pauvre participation.
Je te
souhaite une bonne et sainte année, santé, paix et l’héritage du Paradis à la
fin de tes jours.
Mes
souhaits à toute la communauté,
Patrice
Ces quelques mots du Père
Patrice, qui a été durant douze ans le supérieur général de notre Congrégation
religieuse, m’ont confirmé qu’il était temps de mettre sur papier les
intuitions et les découvertes du Père Cantalamessa. Cela fait déjà quelques
semaines que je désire écrire ce blogue; le moment est donc venu. Merci
Patrice!
Les considérations qui suivent,
sont tirées du livre du Père Cantalamessa, intitulé: Le regard de la
Miséricorde , au chapitre 15. Voici le principe qui sous-tend
tout ce chapitre 15 :
« Le
christianisme – à la différence de toute religion ou philosophie religieuse –
ne commence pas en disant à l’homme ce qu’il doit faire pour être sauvé; il
commence en disant ce que Dieu a fait pour le sauver. Il ne commence pas par le
devoir, mais par le don. … Avant le
devoir, il y a le don; avant les œuvres, la grâce. » (Raniero
Cantalamessa, Le regard de la Miséricorde , p.
159).
La phrase biblique la plus
explicite sur ce sujet, est selon moi celle-ci: « Voici en
quoi consiste l’amour: ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui
qui nous a aimés, et il a envoyé son Fils en sacrifice de pardon pour nos
péchés. » (1
Jn 4, 10).
Voilà ce qui est premier: l’amour de Dieu pour moi, pour
chacun d'entre nous; l’amour de Dieu pour le monde. Ce sera toujours cela qui sera premier
dans ma vie et dans mes actions. Pourquoi aimer les autres? Parce que Dieu
m’aime; parce que Dieu aime la personne que je rencontre, parce que Dieu aime
toutes ses créatures. Et parce que Jésus a prié son Père lors de la dernière
Cène, pour que l’amour dont le Père L’aime lui le Fils, soit en nous: « Père, je leur ai fait connaître ton
nom, et je le ferai connaître, pour que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux,
et que moi aussi, je sois en eux. » (Jn 17, 26)
Le Père Cantalamessa souligne le
fait que certains passages des évangiles peuvent nous mettre sur une fausse
piste. Par exemple:
« Heureux les miséricordieux
car ils obtiendront miséricorde. » (Mt 5, 7)
« Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés » (Mt 6, 12)
« Si vous ne remettez pas
aux hommes, votre Père non plus ne vous remettra pas vos manquements. »
(Mt 6, 15)
Le Père Cantalamessa nous dit que
« ces phrases pourraient nous porter à croire
que la miséricorde de Dieu envers nous est un effet de notre miséricorde envers
les autres, et qu’elle lui est proportionnée. Mais si c’était le cas, le
rapport entre grâce et bonnes œuvres s’en trouverait complètement renversé, et
on détruirait le caractère de pure gratuité de la miséricorde divine. … Nous
devons faire miséricorde parce qu’il nous a été fait
miséricorde, non pour qu’il nous soit fait miséricorde. » (Ibid, p.
161)
« Le
Seigneur vous a pardonnés, faites de même à votre tour. » (Col 2,
13). C’est la grande leçon que nous apprend la parabole des deux serviteurs, ou
la parabole du serviteur qui refuse de pardonner, en Mt 18, 23 sq.
GRÂCE – DON – GRATUITÉ
Comment pouvons-nous imiter
l’amour gratuit de Dieu? Le Père Cantalamessa cite un texte magnifique de
sainte Catherine de Sienne :
« Je
vous demande de m’aimer du même amour dont je vous aime. En vérité vous ne le
sauriez faire complètement. Moi je vous ai aimés, avant d’être aimé, et dès
lors, tout amour que vous avez pour moi, est une dette que vous acquittez, non
une grâce que vous me faites, tandis que l’amour que j’ai pour vous est une
faveur que je vous accorde, mais que je ne vous dois pas. Vous ne pouvez donc
me rendre, à moi, l’amour que je vous réclame. Mais je vous ai placés à côté de
votre prochain, pour vous permettre de faire pour lui ce que vous ne pouvez
faire pour moi: l’aimer par grâce, et
avec désintéressement, sans en attendre aucun avantage. Je considère alors
comme fait à moi ce que vous faites au prochain. » (Sainte
Catherine de Sienne, Dialogue de la Divine Providence , Paris,
Seuil, 2002, p. 64)
Cette citation de sainte
Catherine de Sienne est très intéressante, mais elle ne résout pas tout puisque
saint Paul nous dit: « N’ayez de
dettes envers personne, sinon celle de l’amour mutuel » (Rm 13, 8).
Voilà le paradoxe: je puis aimer gratuitement et de façon désintéressée
mon prochain, mais il n’en demeure pas moins que cet amour, je le lui dois. Pourquoi?
Parce « l’amour a été répandu en nos
cœurs par le Saint Esprit » (Rm 5, 5). L’amour qui est dans le cœur du
chrétien, ne vient pas de lui, Il vient de Dieu, et plus précisément de l’Esprit
Saint. Cet amour ne peut pas être conservé égoïstement et gardé pour soi; il doit être
répandu. Mon prochain y a droit et il pourra toujours réclamer son dû.
« Au jour solennel où se terminait la fête, Jésus,
debout, s’écria: « Si quelqu’un a
soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive, celui qui croit en moi ! Comme dit
l’Écriture: De son cœur couleront des fleuves d’eau vive. » En disant cela,
il parlait de l’Esprit Saint qu’allaient recevoir ceux qui croiraient en
lui. » (Jn 7, 37-39)
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