12 janvier: sainte Marguerite Bourgeoys
Le 12 janvier nous fêtons en Église,
sainte Marguerite Bourgeoys, celle qu’on qualifie de Mère de la colonie. La colonie, c’est Ville-Marie, située sur l’île de Montréal. C’est Jacques Cartier en
1535, qui a donné le nom de Mons realis
à l’île que nous nommons maintenant Montréal. Cette île fut cartographiée par
Samuel de Champlain en 1611 (1).
Le 17
mai 1642, Paul de Chomedey sieur de Maisonneuve donna le nom de Ville-Marie au poste qu’il venait de
fonder sur l’île de Montréal. Je suis très impressionné, en tant qu’Oblat de la Vierge Marie , de savoir que la Nouvelle- France a été confiée
aux soins et à la protection de la Vierge
Marie. Ce choix, à n’en pas douter, vient de Dieu lui-même: « La
Sainte Vierge ayant
reçu de Dieu le domaine de la Nouvelle-France » (citation tirée du « Testament spirituel de Marguerite Bourgeoys »).
Il ne
faut donc pas se surprendre du fait que la Mère de la Colonie , Marguerite Bourgeoys, ait été formée
à la vie chrétienne, par la Vierge Marie
elle-même. C’est aussi la Vierge Marie
qui orientera la vie apostolique de Marguerite et des religieuses qu’elle
fondera: les Sœurs de la Congrégation de
Notre-Dame.
À l’âge
de 20 ans, en 1640, Marguerite vit un moment fondateur de sa vie. Dans ses
manuscrits écrits en fin de vie (en 1697 et 1698), Marguerite nous raconte cet
événement qui marquera toute sa vie:
« … en 1640, le dimanche du Rosaire (le 7 octobre 1640), j’allai à la
procession aux Jacobins, … on traversa une rue et on repassa devant le portail
de Notre-Dame où, il y a, au-dessus de la porte, une image de pierre. Et, en
jetant la vue pour la regarder, je la trouvai très belle et, en même temps, je
me trouvai si touchée et changée que je ne me reconnaissais plus. Et retournant
à la maison, cela paraissait à tous. …
dès ce moment, je … me retirai d’avec le monde, pour me donner au service de
Dieu. » (EMB, p. 234)
Dans un
autre endroit de ses manuscrits, elle écrit : « Je me suis donnée à Dieu en 1640 »
(EMB, p. 250)
Suite à
cette expérience, Marguerite joint la Congrégation externe du Monastère de la Congrégation de
Notre-Dame, fondée par Pierre Fourier :
« Cette
communauté religieuse, vouée à l’éducation des filles, était à la fine pointe
du renouveau pédagogique de son temps; si Pierre Fourier avait dû accepter la
clôture pour ses filles, c’est que l’on n’admettait pas à cette époque que des
religieuses soient non cloîtrées. Pour prolonger leur action éducative
jusqu’aux enfants des milieux populaires, elles avaient constitué la Congrégation externe;
ainsi, des jeunes filles, choisies par les religieuses et formées par elles,
pouvaient aller instruire les enfants des faubourgs. … En entrant dans la Congrégation externe,
Marguerite vient chercher – sans le savoir – la formation religieuse et
pédagogique nécessaire à son œuvre. »
(Sœur Simone Poissant, C.N.D., Marguerite
Bourgeoys, Bellarmin, 1993, pp. 19-20)
On voit
par là que la Sainte Vierge
préparait Marguerite à une forme de vie religieuse tout à fait nouvelle dans
l’Église.
Marguerite
demande à entrer chez les Carmélites, mais elle est refusée. Elle frappe ailleurs,
mais sans succès. Son confesseur, l’abbé Gendret lui présente alors un projet
qui gouvernera toute sa vie future :
« Antoine
Gendret … rêvait, comme Vincent de Paul
à Paris, d’une forme de vie religieuse qui permettrait aux femmes de répondre
aux besoins de leur temps.
La
vertu et les talents que Marguerite avait manifestés comme préfète des
congréganistes, ses dispositions à tout entreprendre pour la gloire de Dieu,
l’amour qu’elle mettait à méditer la vie de la Vierge Marie , tout cela amène
l’abbé Gendret (« monsieur
Gendret », selon la terminologie de l’époque) à la diriger vers une
forme nouvelle de vie religieuse.
Voici
en quels termes elle rapporte le fait: « Monsieur Gendret me dit un
jour que Notre Seigneur avait laissé trois états de filles pour suivre et
servir l’Église; que celui de sainte Madeleine était rempli par les Carmélites
et autres recluses; celui de sainte Marthe, par les religieuses cloîtrées qui
servent le prochain; mais que celui de la vie voyagère de la Sainte Vierge ne l’était pas et
qu’il fallait l’honorer -, que, sans voile ni guimpe, on serait vraiment
religieuse; ce qui m’était agréable, car j’avais pitié des filles qui, faute de
biens, ne pouvaient s’établir au service de Dieu. Il se joint avec Monsieur le
Théologal et compose des règles d’une grande perfection, lesquelles furent
approuvées à la Sorbonne
de Paris. » (Ibid, p. 21)
Ayant
obtenu la permission de son père, Marguerite commence à vivre cette règle de
vie religieuse, avec deux de ses compagnes. Mais l’aventure ne dure guère. Une d’elles meurt et l’autre se marie. Marguerite ira donc vivre ce modèle de vie
religieuse au Canada, en fondant la Congrégation de Notre-Dame. En 1676, Mgr de Laval
reconnaîtra sa communauté en « qualité
de filles séculières ».
J’admire
Marguerite Bourgeoys pour son esprit d’initiative et son leadership. Ce n’est
pas rien d’innover dans l’Église. Il y a toujours des réticences face aux
changements. Marguerite a été une grande novatrice, une grande pionnière; comme
en fait foi le texte suivant:
« Les obstacles ecclésiaux à leur apostolat : En 1566, le pape Pie V interprète avec
rigidité le concile de Trente et décrète que toutes les femmes appartenant à
quelque Ordre que ce soit doivent prononcer des vœux solennels et que toutes
celles qui font des vœux solennels sont tenues à la clôture religieuse. En
France, les communautés enseignantes ou soignantes sont alors soumises à la loi
canonique des contemplatives. Elles pouvaient certes recevoir des élèves,
des pauvres ou des malades dans certaines parties de leurs maisons mais elles
ne pouvaient exercer une action apostolique à l’extérieur, ce qui les
coupait du monde et des personnes au service desquelles elles se destinaient.
Marguerite Bourgeoys écrira à ce sujet « On nous demande aussi pourquoi
nous aimons mieux être vagabondes que cloîtrées, [...] nous répondons que la Sainte Vierge n’a
point été cloîtrée [...] la regardant comme notre institutrice, nous ne sommes
point cloîtrées [...] afin de pouvoir aller partout où l’on nous envoie pour
l’instruction des filles ». Il en allait tout autant de la dot à payer
pour entrer dans une communauté traditionnelle, d’un montant beaucoup plus
élevé que la somme à verser en mariage, ce qui fermait le cloître aux femmes
pauvres. S’éloignant des normes de son temps, Marguerite Bourgeoys conçoit une
communauté devant se suffire à elle-même, écrira Patricia Simpson, « non
pas grâce aux dots ou au patronage des riches, mais par le travail quotidien de
ses propres membres ». (2)
Honorerla Vierge Marie
« voyagère »:
Nous avons vu que Marguerite Bourgeoys a voulu honorer durant sa vie et par sa vie, la vie « voyagère » dela Vierge Marie.
Marie a fait un long voyage au lendemain du jour de l’Annonciation, pour aller
aider et servir sa cousine Élizabeth qui était âgée et enceinte de six mois.
Mais nous savons par l’évangile de saint Luc, que le plus grand fruit de cette
visite, fut de porter le sauveur aux trois habitants de la maison d’Élisabeth
et de Zacharie (Jean le Baptiste étant
bien sûr le troisième habitant). Marguerite Bourgeoys a fait un long voyage
pour aller porter Jésus aux habitants du Nouveau-Monde. Marguerite aurait aimé
connaître notre pape François qui ne cesse de vouloir nous envoyer dans les
« périphéries ».
Honorer
Nous avons vu que Marguerite Bourgeoys a voulu honorer durant sa vie et par sa vie, la vie « voyagère » de
Marguerite Bourgeoys a été canonisée par le pape Jean-Paul
II, le 31 octobre 1982. J’ai eu l’insigne honneur d’être le diacre d’office à
la canonisation de Marguerite Bourgeoys. La photo ci-dessous a été prise ce
jour-là, au moment du « Par Lui,
avec Lui et en Lui », à la messe. À ma droite, on peut entrevoir Mgr
Paul Grégoire, archevêque de Montréal. Ce jour-là, j’ai chanté l’évangile en
latin, en la majestueuse basilique Saint-Pierre de Rome. L’évangile proclamé honorait précisément la « vie
voyagère » de la Vierge Marie.
J’ai proclamé et chanté l’évangile de la visitation de Marie à sa cousine
Élizabeth (Lc 1, 39 à 46). Les derniers mots de l’évangile à cette célébration,
étaient les premiers mots du Magnificat: « Magnificat anima
mea Dominum, et exultavit spiritus meus in Deo salvatore meo ». Oui, c'est bel et bien moi sur la photo, à droite de Jean-Paul II, avec 70 livres en moins.
Rome, le 31 octobre 1982
Honorer la Vierge Marie éducatrice des
apôtres:
Il y a un autre aspect de la vie de la Vierge Marie que Marguerite
Bourgeoys a voulu honorer durant sa vie et par sa vie. Marguerite a voulu
suivre le modèle de Marie « éducatrice
des apôtres ». Voici un aspect de la vie de la Mère de Dieu, qui est
rarement évoqué et honoré. Marie était présente parmi les apôtres après la
résurrection de Jésus; elle était présente au cénacle quand l’Esprit Saint est
descendu sur les Apôtres. Marie a été la principale enseignante des Apôtres, au
lendemain de la résurrection de Jésus. Voici ce que dit sainte Marguerite
Bourgeoys: « Elle était la Mère et la Maîtresse de l’Église
naissante qu’elle formait et instruisait à toutes sortes de biens par ses
paroles et par ses exemples, l’instruction et l’édification faisant son
principal caractère. » (Livret
liturgique de la messe en l’honneur de la sainte, publié par la Conférence des évêques
catholiques du Canada). Marguerie Bourgeoys a été la Mère et la Maîtresse de l'Église naissante au Canada.
Convertie par la beauté:
En nos temps modernes, caractérisés par le culte de la
beauté, et spécialement la beauté physique, il est bon d’avoir devant les yeux
la sainte qu’est Marguerite Bourgeoys. Marguerite Bourgeoys a été convertie par
la beauté, la vraie beauté, la beauté qui vient du ciel, la seule beauté qui
devrait attirer un chrétien. Nous avons vu ci-dessus, que c’est la beauté de la Vierge Marie , manifestée à
Marguerite le jour de la fête du Rosaire (le 7 octobre 1640), qui a été à
l’origine de la « conversion » et de la « vocation » de
Marguerite. Or, dix ans plus tard, en la fête de l’Assomption de la Vierge Marie , le 15 août 1650,
c’est de nouveau la beauté, mais la beauté cette fois de l’Enfant-Jésus, qui
achèvera l’œuvre de la conversion dans le cœur de Marguerite Bourgeoys:
« En la fête de l’Assomption de Marie, le 15 août 1650,
Marguerite est en adoration devant le Saint Sacrement. Elle lève les yeux vers
l’hostie: « elle aperçut un enfant de trois ans d’une beauté si grande
qu’elle ne pouvait en donner une idée; et dès ce moment, elle fut sevrée pour
toujours de toues les beautés du monde et n’eut plus de désirs que pour se
rendre tous les jours plus agréable à Dieu » (Simone Poissant, Marguerite Bourgeoys, op. cit., p.
22)
« Un matin, étant bien éveillée, une grande dame vêtue
d’une robe comme de serge blanche, me dit distinctement: « Va, je ne te délaisserai point »;
et je connus que c’était la Sainte Vierge ,
quoique je ne visse point son visage. Ceci me rassura pour le voyage et me
donna bien du courage, et je ne trouvai plus rien de difficile.
Comme je craignais les illusions, je pensai que, si cela
était de Dieu, je n’avais que faire de rien porter pour mon voyage. Je dis en
moi-même : « Si c’est la volonté de Dieu que j’aille à Ville-Marie,
je n’ai besoin d’aucune chose. »
Je pars de Troyes, sans denier ni maille, avec un petit
paquet que je pouvais porter sous mon bras. » (Ibid,
p. 24)
MERCI VIERGE MARIE d’avoir accepté d’être notre protectrice
du haut du ciel au début de l’épopée missionnaire en Amérique. Merci d’être la Patronne et la Mère de l’Amérique, sous le
vocable de Notre-Dame de Guadalupe.
Nous te prions, Sainte Mère de Dieu, afin que les festivités
du 375ème anniversaire de la fondation de Montréal, soient une
occasion de te louer, de te magnifier et te remercier pour tout ce que tu as
fait et tout ce que tu fais pour notre peuple, pour notre nation. Intercède
pour nous, afin que notre peuple redécouvre la beauté et la grandeur de son
baptême.
Notre-Dame
de Ville-Marie, priez pour nous!
Sainte
Marguerite Bourgeoys, priez pour nous!
(1) Fondation de Montréal - Répertoire du patrimoine culturel du Québec
www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id...
(2) Jeanne Mance et les pionnières de la Nouvelle-France - La Fondation ...
www.fondationlionelgroulx.org › ... › Figures marquantes de notre histoire
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