Conservateur ou libéral ?
Nous venons de commencer une
nouvelle année liturgique, avec un nouvel Avent. Toute nouvelle année
fait désirer des jours plus heureux. Assez souvent, il n’en tient qu’à nous de
favoriser l’avènement de jours plus heureux. Voici une suggestion à cet
égard : essayons de nous débarrasser, durant la présente année liturgique,
de classifier les catholiques en deux catégories: les conservateurs et
les libéraux. Je suis personnellement fatigué d’entendre les gens employer
cette dichotomie. Comme si une personne pouvait n’être que conservatrice, ou que
libérale. Cela ne fait aucun sens.
On essaie, depuis que le pape
François a été élu, de le caser dans une de ces deux catégories. C’est très
néfaste de jouer à ce petit jeu. On semble désirer, dans ce cas, que le pape
soit le représentant d’une seule branche de la catholicité. Or le pape,
justement, est catholique, ce qui veut dire universel. Il représente tous les
catholiques. Il n’est ni libéral, ni conservateur, en ce sens qu’il ne peut pas
être uniquement libéral, ou uniquement conservateur.
De grâce, laissons ces
distinctions entre libéraux et conservateurs, au monde politique. Et même dans
le domaine politique, le pape François ne veut pas être étiqueté. Dans l’avion
qui le ramenait à Rome, après ses interventions au Parlement européen et au Conseil de l'Europe, un
journaliste a voulu « cataloguer » le pape suite à certains
propos qu’il avait tenus. Mais le pape ne s’est pas laissé « cataloguer ».
Voici un extrait de la conférence de presse que le pape a donnée dans l’avion
qui le ramenait à Rome:
Père Lombardi: Nous voilà. Nous sommes déjà
de retour de ce voyage, bref, mais intense. Nous sommes impressionnés par les
deux discours longs et complexes que vous avez prononcés ; vous avez déjà dit
beaucoup de choses. Mais les journalistes ont toujours quelques questions à
poser. Nous en avons préparé cinq : voyez si vous voulez répondre aux cinq.
Alors, nous avons deux Français — étant donné que nous sommes en France, dans
un certain sens — et nous donnons immédiatement la parole à Renaud Bernard qui
est de France Télévision.
Renaud Bernard: Votre Sainteté, bonsoir. Je
suis heureux de poser cette question au nom des journalistes français. Ce
matin, devant le Parlement européen, vous avez prononcé un discours avec des
paroles pastorales, mais des paroles qui peuvent être perçues comme des paroles
politiques, et qui peuvent se rapprocher, selon moi, d’un sentiment
social-démocrate. Je peux donner un bref exemple, lorsque vous dites qu’il faut
éviter que la force réelle d’expression des peuples soit éliminée face aux
pouvoirs multinationaux. Peut-on dire que vous êtes un Pape social-démocrate ?
Le pape:
Mon cher, cela est très réducteur ! Je
ne me sens pas faire partie d’une collection d’insectes: « Voilà un insecte
social-démocrate... ». Non, je dirais que non : je ne sais pas si je suis un
Pape social-démocrate ou pas. Je n’ose pas me placer de tel ou tel côté. J’ose
dire que cela vient de l’Évangile : c’est le message de l’Évangile, assumé par
la doctrine sociale de l’Église. Dans cela, concrètement et dans d’autres
choses — sociales ou politiques — que j’ai dites, je ne me suis pas détaché de
la doctrine sociale de l’Église. La doctrine sociale de l’Église vient de
l’Évangile et de la tradition chrétienne. Ce que j’ai dit — l’identité des
peuples — est une valeur évangélique, non ? Je l’ai dit dans ce sens. Mais tu
m’as fait rire, merci ! (1)
Si le
pape ne désire pas être « classifié » ou mis dans une catégorie en ce
qui concerne le domaine politique, il est facile d’imaginer qu’il
n’apprécierait pas non plus être « catégorisé » dans le domaine religieux. Sa
seule référence, c’est l’Évangile et la doctrine de l’Église. Le pape n’est pas
le chef de l’Église catholique pour rien.
J’ai
bien aimé ce que le cardinal Francis George a dit ces jours-ci à un journaliste
qui lui demandait : « Vous ne vous voyez pas comme un « conservateur
? ». Voici la réponse du cardinal:
« Cette distinction entre « libéral
et conservateur », je pense qu’elle détruit la mission de l’Église et
sa vie. Je l’ai dit publiquement plusieurs fois. Vous prenez une définition qui
vient de nulle part. En ce qui me concerne, c’est une distinction moderne dont
on se sert pour juger la vie de l’Église. C’est parce que nous sommes
paresseux. On met une étiquette sur les gens et sur les choses, et cela vous
évite de faire un effort pour penser. Je pense que comme peuple, nous ne sommes
pas habitués à l’auto critique de notre
façon de penser. … Pour moi, la catégorie qui importe est celle
du vrai et du faux. Je rejette cette déformation de nos vies qui consiste à qualifier quelqu'un de libéral ou de conservateur. Si nous nous limitons à cela, comme la presse le fait parce qu’elle
est incapable de parler de la foi dans les termes qui lui sont propres, alors,
d’une façon ou d’une autre, nous trahissons notre vocation comme évêque ou prêtre. » (2)
w2.vatican.va/.../papa-francesco_20141125_strasburgo-conferenza-stam...
gloria.tv/media/LusBTV3aANS
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire