Le Bon Pasteur
Aujourd’hui, quatrième dimanche de Pâques, c’est le dimanche du Bon Pasteur. À chaque année, Jésus nous redit qu’il est le Bon Pasteur et qu’il connaît ses brebis une à une.
Un des grands obstacles à la foi, c’est le fait qu’en Occident, nous vivons dans un monde hyper industrialisé, hyper technologique, hyper artificiel. Je n’ai rien contre l’art et la technologie. J’apprécie grandement le fait que j’aie un ordinateur et que je puisse vous envoyer chez vous dès aujourd’hui, ces quelques mots. Mais à force de vivre dans un monde artificiel, en vient à oublier le divin et la personne humaine. À force de passer des heures devant un ordinateur, on oublie qu’il y a des gens autour de nous qui ne demanderaient rien de mieux qu’un contact humain. À force de vivre dans le béton, on oublie d’aller prendre un bain de nature et d’aller contempler ce que Dieu crée directement. Un des moyens que le pape Paul VI (dans son exhortation apostolique intitulée : La joie chrétienne) suggère pour trouver ou retrouver la joie, c’est le contact avec la nature. Qui n’éprouve pas de joie en voyant un coucher de soleil sur un lac, sur un fleuve, sur la mer?
L’abbé Guy Gilbert, ce prêtre français à l’allure si originale et au parler souvent déconcertant, a créé une œuvre merveilleuse en France. Il prend soin des « loubards » (loubard : jeune de banlieue, vivant souvent en bande et un peu asocial, voyou). Il aime les loubards, leur vient en aide et les conduit du mieux qu’il peut vers une certaine réhabilitation, vers une certaine réinsertion sociale. Or le moyen de prédilection qu’il a choisi pour atteindre ce but, est : la ferme. C’est au contact des animaux de la ferme, en prenant soin des bêtes, que les jeunes et moins jeunes « délinquants » retrouvent le chemin de l’harmonie intérieure, de la paix et de l’amour. Et tout cela conduit sûrement plusieurs d’entre eux sur le chemin de Dieu.
Le dimanche du Bon Pasteur nous ramène les pieds sur terre, nous invite à reprendre contact avec la nature. L’allégorie du pasteur et de ses brebis est très puissante. Une des leçons ou des grâces que nous recevons, en contemplant la réalité du Bon Pasteur, c’est de nous émerveiller de notre unicité, ce notre caractère unique. À première vue, qu’y a-t-il de plus semblable à une brebis, qu’une autre brebis? J’ai déjà vu (heureusement) un troupeau de brebis. À mes yeux, toutes ces brebis étaient pratiquement identiques. Mais je sais que cette impression était due au fait que je n’étais pas le pasteur des brebis. Le pasteur, le bon pasteur, connaît chacune de ses brebis. Souvent il donne un nom à chaque brebis et il la distingue facilement des autres. Jésus nous dit qu’il connaît chacune de ses brebis par son nom. Jésus, en employant l’image du Bon Pasteur, veut nous dire à quel point Il nous connaît personnellement et nous aime personnellement, puisqu’Il donne sa vie pour chacune de ses brebis, pour chacun de nous.
Il y a plusieurs années, j’étais de passage dans une de nos maisons à Boston. Je regardais la télévision. Un homme dans la trentaine (à mes yeux), prêchait à sa façon la Bonne Nouvelle de l’Évangile à des dizaines de milliers de personnes réunies dans un stade de football. Le nom de cet homme est Leo Buscaglia. Il a dit ceci : « Quand nous mourrons, Dieu va nous poser une question. » Je me demandais bien ce qu’il allait dire. La question qu’il va nous poser, d’après M. Buscaglia, est la suivante : « Why haven’t you been you? »; « Pourquoi n’as-tu pas été toi-même? » M. Buscaglia voulait insister sur le fait que la plupart d’entre nous passent leur temps à admirer les dons et les talents des autres, et semblent incapables de s’apprécier à leur juste valeur. Dieu a mis en nous des talents et des dons qu’Il n’a jamais mis en aucun autre de ses enfants auparavant et qu’Il ne mettra dans aucun de ses enfants jusqu’à la fin du monde, et nous ne savons pas reconnaître les merveilles déposées en nous. Le psaume 139 ne dit-il pas : « Seigneur, je reconnais devant toi le prodige (ou la merveille), l’être étonnant que je suis » (Ps 139, v. 14)? Quand arrêterons-nous de nous comparer désavantageusement aux autres, et saurons nous nous apprécier à notre valeur, à notre immense valeur?
Le petit Prince, chef d’œuvre littéraire écrit pas Saint-Exupéry peu de temps avant sa mort, est un de mes livres préférés en raison de la profondeur des vérités, pourtant très simples, qu’il contient. Le petit prince avait connu une rose et était tombé amoureux de « sa rose ». Il en prenait soin, il l’arrosait, lui parlait, etc. Un jour, le petit prince vécut une peine d’amour avec sa chère rose et il décide d’aller purger sa peine en faisant un long voyage. Il aboutit sur terre et il a le malheur de tomber sur un champ de roses, un champ contenant des centaines de roses. Quel choc ce fut pour lui! Il se dit : « Moi qui croyait connaître et aimer une rose unique, voilà que je me rends compte que j’ai aimé une rose quelconque, une rose semblable à des milliers de roses! » En effet, quand nous sommes en présence d’un champ de roses, ne nous semblent-elles pas toutes identiques? Il a fallu la sagesse et la perspicacité d’un renard rencontré par hasard et devenu son ami, pour lui ouvrir les yeux sur le mystère de l’unicité des êtres. Le renard lui dit : « C’est le temps que tu as donné à ta rose, qui rend ta rose si importante! » Quelle belle leçon de vie! C’est le temps que tu as consacré à ton épouse, qui rend ton épouse si importante! C’est le temps que tu as consacré à tes enfants, qui rend tes enfants si importants. C’est le temps que tu as consacré à Dieu, qui rend Dieu si important à tes yeux.
L’allégorie du Bon Pasteur célèbre précisément cet aspect de l’amour de Dieu pour nous : de même que le pasteur passe toute sa vie avec ses brebis, de même Dieu fait-il avec nous : Il est tout le temps avec nous. La Bible affirme haut et fort : « Non, il ne dort pas ton gardien Israël; Il ne sommeille pas ton gardien »! Le pape Jean-Paul II a dit un jour : « Le problème de l’absence de Dieu n’existe pas; c’est un faux problème. Dieu est toujours présent à nous. Le seul problème véritable c’est l’absence qui réside de notre côté; c’est nous qui ne pensons pas toujours à Dieu, ou pas souvent à Dieu. C’est nous qui sommes absents à Lui. C’est nous qui ne réalisons pas suffisamment que nous sommes en sa présence. » J’ai cité de mémoire cette phrase de Jean-Paul II, et je l’ai arrangée un peu à ma façon. Or si Dieu est toujours avec nous; et s’il est vrai que c’est le temps que nous passons avec une personne qui rend cette personne importante à nos yeux, combien Dieu doit nous aimer !!! Que le dimanche annuel du Bon Pasteur, nous aide à goûter cette vérité et à nous en émerveiller de plus en plus.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire