Le pharisien et le publicain
" Jésus dit une parabole pour certains hommes qui étaient
convaincus d’être des justes et qui méprisaient tous les autres : « Deux hommes
montèrent au Temple pour prier; l'un était pharisien, l'autre publicain. Le
pharisien se tenait là et priait en lui-même : « Je te remercie, mon Dieu,
de ne pas être comme les autres hommes, voleurs, malhonnêtes, adultères, ou
encore comme ce publicain. Je jeûne deux fois par semaine et je verse le
dixième de tout ce que je gagne ». Le publicain, lui, se tenait à distance
et n'osait même pas lever les yeux vers le ciel; mais il se frappait la
poitrine en disant : « Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis ! »
« Quand ce dernier rentra chez lui, c’est lui, je vous le déclare, qui
était devenu juste, et non pas l’autre. Quiconque en effet s'élève, sera
abaissé, et celui qui s'abaisse sera élevé. » " (Lc 18, 9-14)
Décidemment,
nous sommes gâtés par les temps qui courent. Nous entendons aujourd’hui
en Église, en ce trentième dimanche du temps ordinaire, une des plus
belles pages des évangiles : la
parabole du pharisien et du publicain. En ce temps-ci de l’année, nous
lisons l’évangile de saint Luc, lors des célébrations dominicales. Saint Luc a
cette particularité intéressante : lorsqu’il nous rapporte une parabole de
Jésus, il nous donne souvent la raison pour laquelle Jésus a inventé cette
parabole. Dimanche dernier, dès le début de l’évangile, saint Luc nous disait
que Jésus a inventé une parabole pour nous montrer qu’il faut toujours prier,
sans nous décourager. Et nous avons eu droit à la parabole du juge inique et de
la veuve. Aujourd’hui, l’évangile commence ainsi : « Jésus dit une parabole
pour certains hommes qui étaient convaincus d’être justes et qui méprisaient
tous les autres ». Lorsque, au début du chapitre 15 de son
évangile, saint Luc nous rapporte les trois merveilleuses paraboles de la
miséricorde, il nous dit : « Tous
les publicains et les pécheurs s’approchaient de Jésus pour l’entendre. Et les
Pharisiens et les scribes de murmurer : « Cet homme, disaient-ils,
fait bon accueil aux pécheurs et mange avec eux. » Il leur dit alors cette
parabole. » (Lc 15, 1-3). Et Luc poursuit non seulement avec la
parabole de la brebis perdue, mais aussi avec la parabole de la femme qui perd
une pièce de monnaie et finalement, avec la parabole la plus belle de
toutes : la parabole du Père miséricordieux, communément appelée la
parabole de l’enfant prodigue, qui commence ainsi : « Un homme avait deux fils », dont l’un était
manifestement pécheur, et l’autre, manifestement pharisien. Ces trois
paraboles, Jésus nous les donne en rafale. C’est un peu comme si, lorsqu’Il se
met à parler du plus beau des attributs divins, c’est-à-dire la Miséricorde, Jésus
est incapable de s’arrêter. Il nous donne, non pas une seule parabole, mais
bien trois. Saint Luc aurait mieux fait de nous dire, au verset trois du
chapitre quinze de son évangile : « Il leur dit alors ces paraboles ».
Aujourd’hui,
nous voyons une fois de plus que le thème du pécheur et du pharisien est très
cher à Jésus. Nous sommes au chapitre 18 de l’évangile, et Jésus reprend le
thème qu’il avait abondamment développé au chapitre 15. La parabole
d’aujourd’hui nous présente deux hommes qui montent au Temple pour
prier : l’un est si sûr de lui et si convaincu de sa justice; l’autre, est
si peu sûr de lui, si peu fier de lui-même, mais confiant en la Miséricorde
divine. L’évangile affirme que lorsque ces deux hommes retournèrent chez eux,
c’est le pécheur qui était « justifié »,
qui était devenu juste.
Lorsque j’étais
à Rome, au moment de faire mes études en théologie pour devenir prêtre, notre
professeur de morale nous a dit un jour : « Voulez-vous savoir à quel point vous êtes saints? Demandez-vous
à quel point vous vous reconnaissez pécheurs. Plus vous vous reconnaîtrez
pécheurs, plus vous serez saints ! » Il y a beaucoup de vrai dans ces
phrases. Je suis convaincu que tous les saints étaient très nettement et
profondément conscients d’être des pécheurs, de pauvres pécheurs. On nous dit
que certains « se confessaient »
(allaient au sacrement de la
réconciliation) à chaque jour. La première fois que j’ai entendu cela, je
me suis dit en moi-même (comme le
pharisien de la parabole) : « Ces
gens étaient de purs scrupuleux ». Mais j’ai changé d’opinion. Plus
une personne se rapproche de la sainteté, plus elle se reconnaît pécheresse.
Les saints voyaient immédiatement leurs fautes, à peine commises, peu importe
leur degré de gravité. La comparaison suivante peut être utile pour comprendre
cela : gardez les rideaux fermés chez vous, durant deux à trois semaines,
et vous risquerez de ne pas voir la poussière qui s’accumule. Mais dès que vous
ouvrirez les rideaux, et que vous laisserez entrer le soleil, la poussière vous
sera manifeste. De même en est-il pour nos âmes. Gardez votre âme dans les
ténèbres et vous ne verrez peut-être pas que vous êtes dans le péché. Mais
laissez entrer la lumière de la Parole de Dieu dans votre vie, et vous vous
reconnaîtrez pécheurs, et idéalement, grands pécheurs. J’aime beaucoup la
phrase suivante : « Petit
pécheur, petit Sauveur; grand pécheur, grand Sauveur ! ». De qui
avez-vous besoin, chers amis ? D’un petit Sauveur, ou d’un grand Sauveur?
Notre cher pape
François est un exemple en ce sens. Comme vous, j’imagine, j’aime beaucoup
notre nouveau pape. De tout ce que j’ai lu et entendu de notre pape François,
voici les phrases qui m’ont, à date, le plus impressionné : en août
dernier, un des confrères Jésuites du pape l’a interviewé et lui a
demandé de se définir comme personne. Le Père Antonio Spadaro, sj, lui
demanda : « Qui est Jorge Mario Bergoglio? Le pape François a répondu : « Je ne sais pas quelle est la définition la plus juste … Je suis
un pécheur. C’est la définition la plus juste … Ce n’est pas une manière de
parler, un genre littéraire. Je suis un pécheur. … Je
suis un pécheur sur lequel le Seigneur a posé son regard ». Je sais que j’ai déjà cité
ces paroles du pape, sur mon blogue, en date du 21 septembre dernier, mais
jamais je ne me lasserai de lire ces mots et de les mettre sous vos yeux. Ces
paroles du pape, comme il le dit lui-même, ne sont pas une figure de style, une
façon de bien parler et surtout de bien paraître; ce sont les mots qui, aux
dires du pape, le définissent le mieux, le décrivent le mieux. Quelle grâce
d’avoir un pape qui se reconnaît si aisément pécheur !!! Mais pécheur aimé de Dieu, infiniment aimé de Jésus.
Le pape aime se laisser regarder par Jésus, dans sa pauvreté. Comme Marie de
Nazareth d’ailleurs, qui dit, au début de son Magnificat : « Il a jeté les yeux sur la petitesse de sa
servante, désormais tous les âges me proclameront bienheureuse »
(Lc 1, 48) Oui, comme le dit Jésus à la fin de
l’évangile d’aujourd’hui : « Qui s’élève sera abaissé; qui
s’abaisse, sera élevé ».
Le pape Jean-Paul II a dit
un jour : « Le sens du péché se perd, parce que le sens de Dieu se
perd ». Ce cher pape a tout à fait raison. Enlevons Dieu et il n’y a
plus de péché. Car le péché est essentiellement une offense faite à Dieu. Voilà
peut-être la raison principale pour laquelle tant de personnes aujourd’hui
semblent si fières d’être athées. Alors que le pharisien de la Bible, est un
croyant, le pharisien des temps modernes est souvent athée. L’athée peut être
pharisien s’il considère qu’il ne fait rien de mal dans sa vie. Un derniers mot
sur le pharisaïsme : le pharisien a la fâcheuse habitude de regarder les
autres et d’aimer à se comparer aux autres. C’est un des traits du pharisaïsme
qui est mis en évidence dans l’évangile d’aujourd’hui. Alors que le publicain a
les yeux sur lui-même et ne se laisse pas distraire par des comparaisons
futiles avec son prochain, le pharisien se plaît à regarder les autres de haut,
et à les juger. Méfions-nous des personnes qui ne cessent de penser et de dire
du mal des autres. Jésus n’a-t-il pas dit : « Qu’as-tu à regarder la paille qui est dans
l'œil de ton frère ? Et la poutre qui est dans ton œil à toi, tu ne la
remarques pas ! » (Mt 7, 3)
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