lundi 25 mars 2024

Erreur: la catéchèse avant le kérygme

Erreur: la catéchèse avant le kérygme 

Je fais partie des peronnes qui considèrent que le statu quo dans la façon de former les gens de notre époque à la vie chrétienne, est vouée à l'échec à plus ou moins brève échéance.  Le pape François nous invite à être créatifs : 

"La pastorale en terme missionnaire exige d’abandonner le confortable critère pastoral du “on a toujours fait ainsi”. J’invite chacun à être audacieux et créatif dans ce devoir de repenser les objectifs, les structures, le style et les méthodes évangélisatrices de leurs propres communautés. Une identification des fins sans une adéquate recherche communautaire des moyens pour les atteindre est condamnée à se traduire en pure imagination." (La joie de l'Évangile, no. 33)

Or, nous le savons tous, changer notre manière de faire n'est jamais facile. Et si l'on demande à un groupe de personnes ou à une organisation de changer sa façon de faire, on se heurte inmanquablement à certaines personnes qui résistent haut et fort à tout changement. Mais cela ne devrait pas nous empêcher de prôner un changement et de changer.   

Depuis quelques années, nous comprenons beaucoup mieux ce qu'est le plan de Dieu pour notre monde et pour l'Église du Christ. Nous comprenons que le mandat que Jésus a confié à son Église, et donc à chacun et chacune de nous, c'est de FAIRE DES DISCIPLES. 

Et nous comprenons de plus en plus sur quoi nous devons insister pour FAIRE DES DISCIPLES. Ce sont les premiers chrétiens tels qu'on les voit vivre dans le livre biblique des Actes des Apôtres qui nous montrent comment vivre en disciples de Jésus. Pour être un disciple accompli de Jésus, il faut vivre les 5 essentiels de la vie chrétienne : la prière, la fraternité, la formation, le service et l'évangélisation. 

Il est essentiel de réaliser que nous ne vivons plus dans une société chrétienne. Le Québec d'avant les années soixante pouvait en un sens se considérer comme une nation chrétienne. Mais en 2024, nous ne vivons plus dans une société chrétienne. Dire que nous vivons dans une société païenne est beaucoup plus près de la réalité. Cependant, nous agissons souvent comme si nous étions encore dans une société chrétienne.  

La plus grosse erreur que nous commettons en ce moment est, selon moi, celle-ci : nous catéchisons et nous donnons des sacrements à des personnes qui n'ont jamais entendu parler du kérygme ou qui, tout au moins, n'ont jamais adhérer au kérygme. Le kérygme est l'annonce centrale de notre foi : Dieu est venu vivre parmi nous. Il nous a enseigné comment vivre et il est mort et ressuscité en son Fils Jésus pour que nous ayons en nous la Vie éternelle ou, en d'autres mots, pour que nous soyons sauvés. Si l'être humain ne se reconnaît pas comme étant pécheur et s'il n'a pas besoin d'un Sauveur, il ne devrait pas, selon moi, être catéchisé (1) ou recevoir des sacrements. La formation à la vie chrétienne commence par reconnaître le plan de Dieu sur l'humanité et y adhérer. La formation à la vie chrétienne commence par l'annonce du kérygme et l'adhérence au kérygme.   

Quand le christianisme était à ses débuts...

Dans l'Église des origines, on distinguait encore clairement deux réalités - entre "Kérygme" et "Didaché", c'est-à-dire entre "prêcher" et "enseigner". Les mères et les pères de l'Église ne voulaient pas commencer à enseigner (la réflexion raisonnable sur la foi) avant qu'un déclic ne se soit produit avec un candidat au baptême, c'est-à-dire avant que le message de tous les messages - le "Kérygme" - n'ait atteint une personne et ne se soit réellement enraciné en elle. Ils pensaient : Il ne sert à rien de parler de la foi, de faire la catéchèse, de faire de la théologie si cette foi initiale n'est pas là. Le père Raniero Cantalamessa, prédicateur de la Maison pontificale, le pense encore aujourd'hui. La théologie est bien sûr "très pertinente ... mais pas pour quelqu'un qui doit d'abord entendre le kérygme et qui doit ensuite recevoir un enseignement catéchétique. Sinon, c'est comme un discours sur la didactique de la nage sans jamais avoir été dans l'eau." (2)

L'abbé James Mallon est un prêtre de la Nouvelle-Écosse qui a une grande expérience dans le domaine de l'évangélisation. Il est le genre de prêtre qui aime creuser les questions essentielles que nous devons nous poser aujourd'hui en Église. Il s'est aussi beaucoup renseigner pour voir ce qui se fait de beau et de bien ailleurs et en particulier au sein des Églises protestantes qui ont souvent réfléchi beaucoup plus que nous les catholiques sur les moyens les plus efficaces de proposer la foi chrétienne aujourd'hui. Voici, ci-dessous, un passage de son livre intitulé : "Manuel de survie pour les paroisses - Pour une conversion pastorale", aux pages 289 et 290 :


Chaque phrase de ces paragraphes est importante et mérite d'être considérée très sérieusement afin d'en tirer des conclusions pratiques pour notre pastorale.  

J'aime beaucoup M. José Prado Flores, le fondateur de l'École d'Évangélisation Saint André. Dans la vidéo ci-dessous, il reprend cette idée qu'il faut d'abord faire vivre une relation à Jésus Ressuscité avant d'entreprendre de la catéchèse. La vidéo est sous-titrée en français. 

... qui ont reçu une formation solide et profonde ". Il met en garde les évêques contre l'attentisme, le fatalisme et la te

Selon moi, le meilleur moyen de faire cela, c'est de demander aux familles de participer régulièrement à la messe dominicale. 

Dernière remarque : Il ne faudrait pas idéaliser la formation chrétienne que les gens de mon âge ont reçue. Il est vrai que grâce au régime de société qui existait à l'époque, nous étions privilégiés en ce qui concerne la formation chrétienne. Nos parents avaient presque tous la foi, ce qui fait que dès nos premières années de vie, nous entendions parler de Jésus et nous voyions notre père et notre mère sanctifier le dimanche en participant à l'eucharistie. Quand nous arrivions sur les bans de l'école, nous savions que Jésus était mort et ressusciter pour nous et nous y croyions ; nous avions aussi, pour la plupart d'entre nous, appris à prier. Peut-être que nous n'avions pas encore "rencontré" personnellement le Seigneur mais nous étions de façon évidente sur le chemin qui précède la rencontre avec Dieu. Il n'en est plus ainsi aujourd'hui. 

“Les mamans transmettent souvent également le sens le plus profond de la pratique religieuse : dans les premières prières, dans les premiers gestes de dévotion qu’un enfant apprend, est inscrite la valeur de la foi dans la vie d’un être humain. C’est un message que les mères croyantes savent transmettre sans beaucoup d’explications : celles-ci arriveront après, mais la semence de la foi réside dans ces premiers, très précieux instants. Sans les mères, non seulement il n’y aurait pas de nouveaux fidèles, mais la foi perdrait une bonne partie de sa chaleur simple et profonde.” (Pape François, Audience gérnérale du 7  janvier 2015))

Mais on ne peut pas dire que nos parents savaient de façon distincte ce qu'était la vie chrétienne. L'importance des cinq essentiels de la vie chrétienne était une notion inconnue de nos parents. En ce sens, nous sommes mieux équipés aujourd'hui pour connaître ce qu''est dans son ensemble et dans son intégralité, la vie chrétienne. 


(1) Le mot "catéchisé" est ici entendu en son sens véritable : la catéchèse vient en second dans la formation à la vie chrétienne.

(2) Cette citation ne vient pas du Catéchisme de l'Église catholique pour les jeunes, appelé YOUCAT, mais plutôt du site internet qui porte le même nom : 

https://youcat.org/fr/credopedia/kerygme/ 


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