Bienheureux Joseph Chiwatenhwa,
Huron, martyr
"Né au début du dix-septième siècle, Joseph Chiwatenhwa vivait à Ossossané (2), où il participait à la traite des fourrures. Peu riche en biens terrestres mais doué de rares qualités, neveu d’un grand chef huron, le Bienheureux jouissait de l’estime de ses compatriotes et avait voix à leurs conseils.
Dès avant sa conversion, son genre de vie tranchait sur celui de son peuple. Ses coutumes étaient sobres: les jeux de hasard, l’usage du tabac ou encore les festins diaboliques lui étaient étrangers. Très jeune, il avait épousé une fille de sa nation, nommée Aonette. Il comprit et respecta toujours la fidélité conjugale, à peu près inconnue chez les Hurons. Bref, docile à la loi naturelle inscrite par Dieu dans le cœur de tous les hommes, Chiwatenhwa vivait déjà de façon exemplaire.
L’arrivée à Ossossané des missionnaires Jésuites – et particulièrement de saint Jean de Brébeuf – changea à jamais sa vie. Il adhéra de bonne heure à leurs enseignements. Son plus grand désir était de recevoir le saint baptême, grâce qui lui fut accordée le 16 août 1637, alors qu’il gisait sur un lit de douleurs, suspendu entre la vie et la mort. Des prières au grand saint Joseph, dont il avait reçu le nom au baptême, lui rendirent la force et la santé. «Puisqu’il a plu à Dieu de me rendre la santé, dit le nouveau chrétien, je suis résolu de Lui être très fidèle toute ma vie. Je ferai en sorte que les autres Le connaissent.» Jusqu’à sa mort, ce sera le mot d’ordre de notre Bienheureux: il sera l’apôtre des Hurons.
Apôtre d’abord dans sa propre famille. Le 19 mars 1638, sa femme Aonette était baptisée à son tour, ainsi que plusieurs neveux et nièces. Le même jour, le Père de Brébeuf bénissait l’union de Joseph et Marie Aonette; célébrant ainsi le premier mariage chrétien en Huronie. Joseph Chiwatenhwa ne permettait aux siens aucune offense envers Dieu; il avait à cœur de bien enseigner à ceux que Dieu lui avait confiés directement. Aussi, sa famille offrait à tous l’édifiant spectacle d’une vie vraiment chrétienne.
Apôtre ensuite dans son village et dans toute la Huronie. Animé, au dire d’un Père, d’un esprit semblable à celui des Apôtres à leur sortie du Cénacle, Chiwatenhwa parlait de Dieu en toute occasion, et avec une force qui ne pouvait lui venir que d’En-haut. Ses exemples étayaient solidement ses paroles. Il faisait publiquement profession de sa foi, refusait d’assister aux cérémonies païennes, d’avoir recours aux magiciens etc. La piété courageuse de Joseph Chiwatenhwa et la dévotion persistante de sa famille dans des circonstances très dures constituaient une bonne réponse aux Hurons qui prétendaient qu’un indigène ne pouvait atteindre au degré de moralité exigée par le Christianisme.
Débordant de reconnaissance pour les missionnaires qui lui avaient enseigné la vraie Foi, Joseph les aidait de toutes ses forces dans leur œuvre apostolique. Il les accompagnait dans leurs courses, les défendait dans les conseils hostiles, préparait le cœur de ses compatriotes à recevoir leurs enseignements. Ce faisant, il s’exposait à un danger très réel, car on accusait déjà les Jésuites de sorcellerie et on les tenait responsables des épidémies qui, en 1640, avaient fini par réduire de moitié la population huronne. La foi de Joseph ne fléchit pas lorsque plusieurs membres de sa famille moururent ou tombèrent malades, ni même quand sa belle-sœur succomba à la maladie et décéda moins de 48 heures après son baptême.
Les Exercices spirituels de saint Ignace suivis avec ferveur (janvier 1640) relancèrent le Bienheureux sur l’étroit sentier de la perfection. Son âme s’épurait au sein de grandes épreuves. Le 2 août 1640, elle était mûre pour le Ciel. Ce jour-là, Joseph Chiwatenhwa travaillait seul dans son potager lorsqu’il fut traîtreusement mis à mort par deux Amérindiens. Le meurtre fut mis au compte des Iroquois; de graves raisons semblent cependant indiquer que le Bienheureux fut tué par son propre peuple, en haine de la foi.
L’oblation du généreux martyr ne tarda pas à porter un fruit abondant. Après sa mort, les conversions se multiplièrent, à commencer par celle de son propre frère – également baptisé Joseph – qu’il avait vainement essayé de gagner à Dieu de son vivant." (3)