En quel Jésus croyon-nous? Une chose est certaine, chers amis, il n’est pas facile de comprendre Jésus, de connaître Jésus. Et ce n’est pas tout le monde qui a la chance de suivre des cours de christologie. Mais cela ne devrait pas nous empêcher d’étudier la question et d’approfondir la question. Récemment, je me suis à nouveau posé les questions suivantes : Pourquoi Jésus priait-il ? Qu’est-ce que Jésus disait à son Père dans la prière ? Qu’est-ce que Jésus demandait dans la prière, à supposer qu’il demandait quelque chose ? J’ai posé cette question à deux amis prêtres et j’ai constaté que nous avions des réponses très différentes sur ces questions. J’ai cru comprendre que mes deux amis prêtres à qui j’ai posé mes questions, semblaient croire que Jésus a prié pour montrer qu’il était toujours en union avec son Père et pour nous donner l’exemple, c’est-à-dire pour nous montrer que nous devons nous aussi prier et beaucoup prier. Mes deux amis ne semblent pas d’accord avec moi pour dire que Jésus, quand il priait, demandait des choses à son Père dans le but de connaître sa pensée ou sa volonté. Mes deux amis semblent penser que Jésus savait tout puisqu’il est Dieu, et qu’il priait uniquement pour consolider en quelque sorte son union avec son Père. J’avoue que cela me semble bizarre et pas très conforme avec la christologie qui est en vigueur aujourd’hui. Je pense pour ma part que Jésus ne savait pas tout comme homme, dans son humanité, et qu’il priait très souvent et même des nuits entières, pour connaître la Volonté de son Père. Et dans le jardin de Gethsémani, quand il a commencé à souffrir sa douloureuse Passion, il a prié pour recevoir de son Père la force d’aller jusqu’au bout de son amour pour nous.
Je vais citer quelques passages d’un enseignement du Père Raniero Cantalamessa sur la prière de Jésus. On ne peut pas douter, selon moi, de l’orthodoxie de l’enseignement du Père Cantalamessa, puisqu’il est le prédicateur pontifical depuis l’année 1980. Il vient même d’être fait cardinal par le pape François.
2003-12-08 Triuggio, Exercices spirituels pour les religieux :
« Il y a pour ainsi dire dans l’évangile, deux Jésus : un Jésus public qui agit, qui parle, qui fait des miracles, qui chasse les démons, et un Jésus secret, intime, que j’appelle le « Jésus caché entre les lignes de l’Évangile »; c’est le Jésus qui prie, le Jésus qui parle avec son Père, le Jésus intime. Comme il est facile de ne pas se rendre compte de ce Jésus! De lire l’Évangile et ne pas recevoir ce Jésus intime, profond, en dialogue avec son Père. Cette représentation de Jésus qui prie sur la montagne ou ailleurs, dans la solitude, me fascine! …
Jésus avait l’Esprit Saint depuis le début, mais il n’avait pas cet Esprit Saint qui lui fut donné au Baptême, cette plénitude qui était en vue de sa mission messianique qu’il commençait en ce lieu. C’est là que le Seigneur Jésus, dans sa maturation en âge, grâce et sagesse, est parvenu à la pleine conscience, non seulement qu’il était le Messie, mais qu’il serait le Messie souffrant, humble et obéissant. C’est pour cette mission que l’Esprit Saint lui a été donné. » …
Le Père Cantalamessa dit clairement que l'Esprit Saint n'habitait pas la Personne de Jésus de la même façon tout au long de son existence. Au début de sa vie publique, il a reçu l'Esprit Saint en plénitude, et cela, en vue de la mission qu'il commençait à entreprendre. Le Père Cantalamessa dit aussi clairement que Jésus, dans son humanité, a pris conscience au fil des années de la façon dont il exercerait son rôle messianique.
Au chapitre 6, verset 12, il est dit : « En ces jours-lè, Jésus s’en alla sur la montagne pour prier et il passa la nuit en prière. » Voilà le Jésus caché! « Quand il fit jour, il appela ses disciples et en choisit douze auxquels il donna le nom d’apôtres. » Jésus fait de jour ce qu’il a vu dans la prière être la volonté de son Père. »
Les mots que je viens de mettre en caractères gras me laissent penser que l'intuition que j'ai depuis quelque temps est la bonne: Jésus savait qu'il avait besoin de choisir certains de ses disciples comme apôtres. Mais il ne savait pas encore lesquels il devait choisir. Je pense que c'est dans sa prière avec son Père que Jésus a vu et compris quels étaient les hommes qu'il devait choisir comme apôtres. C'est du moins ainsi que j'interprète les mots du Père Cantalamessa. En cela, Jésus est notre modèle dans la sphère du "discernement sprirituel "; c'est dans la prière qu'il percevait la Volonté de son Père.
Dans ce même enseignement, le Père Cantalamessa parle du mystère de la Transfiguration selon l’évangéliste saint Luc. Le Père Cantalamessa nous dit à cette occasion que le mystère de la Transfiguration est un mystère de prière, car c’est pendant qu’il priait que Jésus fut transfiguré devant trois de ses apôtres :
« Huit jours plus tard (NDLR : Huit jours après avoir annoncé pour la première fois à ses apôtres qu’il allait souffrir, mourir et ressusciter le troisième jour), Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean et monta sur une montagne pour prier; et pendant qu’il priait, son visage changea d’aspect et son vêtement devint blanc et resplendissant; et on entendit une voix venant du ciel, qui disait: « Celui-ci est mon fils bien-aimé, écoutez-le ». La transfiguration est aussi un mystère de la prière de Jésus. Jésus alla sur la montagne pour prier et en priant il s’enflamma. Tout comme lors du baptême, il déchira les cieux et en fit descendre l’Esprit Saint, ici en priant, il déchire les parois de son humanité, et la divinité, la lumière du Père, transparaît à l’extérieur et éblouit les disciples qui tombent à terre. Jésus n’alla pas sur la montagne pour être transfiguré (ce fut la surprise du Père), mais il alla sur la montagne pour prier. » (1)
J’ai mis les derniers mots en caractères gras parce que, en lisant cette réflexion du Père Cantalamessa, je me suis rendu compte que moi aussi, je « divinise » trop rapidement et trop facilement Jésus. Pas plus tard que cette année, en prêchant sur le mystère de la Transfiguration, j’ai dit aux gens que tout était calculé dans la vie de Jésus. Je me suis servi de ce mystère pour dire que Jésus ne faisait rien au hasard, qu’il posait toujours ses actions dans un but précis. Par exemple, je disais que huit jours après avoir annoncé sa Passion, Jésus emmena trois apôtres sur le mont Tabor, pour être transfiguré devant eux et les encourager pour le jour où ils le verraient souffrir. Or, le Père Cantalamessa ne dit pas du tout cela. Il dit clairement que Jésus en allant sur la montagne, ne savait pas qu’il allait être transfiguré. C’est en priant qu’il fut transfiguré. Cela montre donc que c’est le Père qui a un plan pour Jésus et que c’est Lui, le Père Tout-Puissant qui fait entrer petit à petit Jésus et ses amis dans « son plan ».
Oui, cette question est très pertinente : En quel Jésus
croyon-nous?
(1) http://www.cantalamessa.org/?p=1004
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