Aujourd’hui, l’Église universelle célèbre la mémoire de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte Face. Thérèse est ma sainte préférée.
« Thérèse, chère Thérèse, je te demande de faire énormément de bien aujourd’hui sur la terre. Bénis tout spécialement les millions de personnes qui recourront à toi durant la journée. Tu connais les besoins spirituels et physiques de chacun puisque tu es en Dieu. Viens à notre aide, toi que nous aimons tant. »
Thérèse de l’Enfant-Jésus nous est présentée par l’Église comme un modèle de confiance en Dieu. La petite voie de Thérèse est la voie de la confiance. C’est la confiance de l’enfant devant la bonté et la toute-puissance du Père. Évidemment, la confiance de Thérèse, tout comme la nôtre, a été mise à l'épreuve. Thérèse, la dernière année de sa vie, a vécu l’enfer. Nous le savons car elle a daigné nous mettre au courant de cette rude épreuve. Durant un peu plus d’un an, cette sainte admirable a perdu toute jouissance de Dieu, toute jouissance de la foi. Il lui semblait que Dieu était absent de sa vie. Bien plus, il lui semblait qu’elle ne verrait jamais Dieu et que Dieu n’existait plus pour elle. Je dis bien qu’il « lui semblait »; car Thérèse, même dans cette dure épreuve de la foi, a toujours cru en Dieu. Elle n’a jamais perdu la foi quoiqu’elle ait perdu la jouissance de la foi. En cela, Thérèse a vraiment été héroïque. Elle est certainement une des championnes de la foi que l’Église peut nous proposer comme modèle. Durant cette année particulièrement éprouvante, cette année de noirceur intérieure, Thérèse s’est sentie très proche des athées et en communion avec eux. Elle a beaucoup prié pour eux et a offert ses souffrances morales et physiques pour qu’un jour eux aussi retrouvent le chemin de la Lumière.
Voici quelques unes des phrases que Thérèse nous a laissées sur le thème de la confiance :
Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus (1873-1897)
Ce qui offense Jésus, ce qui le blesse au cœur c'est le manque de confiance !...
Lettre à Marie Guérin, 30 mai 1889 (LT 92).
Je ne puis craindre un Dieu qui s'est fait pour moi si petit... je l'aime !… car il n'est qu'amour et miséricorde !
Lettre à l'Abbé Bellière, 25 août 1897 (LT 266).
A tout péché miséricorde, et le bon Dieu est assez puissant pour donner du fond même aux gens qui n'en ont pas.
Lettre à Céline, 13 août 1893 (LT 147).
Ce qui plaît au bon Dieu, c'est de me voir aimer ma petitesse et ma pauvreté, c'est l'espérance aveugle que j'ai en sa miséricorde... Voilà mon seul trésor.
Lettre à Sœur Marie du Sacré-Cœur, 17 sept. 1896 (LT 197).
Vous aimez St Augustin, Ste Madeleine, ces âmes auxquelles « Beaucoup de péchés ont été remis parce qu'elles ont beaucoup aimé ». Moi aussi je les aime, j'aime leur repentir, et surtout… leur amoureuse audace ! Lorsque je vois Madeleine s'avancer devant les nombreux convives, arroser de ses larmes les pieds de son Maître adoré, qu'elle touche pour la première fois ; je sens que son cœur a compris les abîmes d'amour et de miséricorde du Cœur de Jésus, et que toute pécheresse qu'elle est ce Cœur d'amour est non seulement disposé à lui pardonner, mais encore à lui prodiguer les bienfaits de son intimité divine, à l'élever jusqu'aux plus hauts sommets de la contemplation.
Ah ! mon cher petit Frère, depuis qu'il m'a été donné de comprendre aussi l'amour du Cœur de Jésus, je vous avoue qu'il a chassé de mon cœur toute crainte. Le souvenir de mes fautes m'humilie, me porte à ne jamais m'appuyer sur ma force qui n'est que faiblesse, mais plus encore ce souvenir me parle de miséricorde et d'amour.
Comment lorsqu'on jette ses fautes avec une confiance toute filiale dans le brasier dévorant de l'Amour, comment ne seraient-elles pas consumées sans retour ?
Lettre à l'Abbé Bellière, 21 juin 1897 (LT 247).
Je sais qu'il faut être bien pur pour paraître devant le Dieu de toute Sainteté, mais je sais aussi que le Seigneur est infiniment Juste et c'est cette justice qui effraye tant d'âmes qui fait le sujet de ma joie et de ma confiance. Être juste, ce n'est pas seulement exercer la sévérité pour punir les coupables, c'est encore reconnaître les intentions droites et récompenser la vertu. J'espère autant de la justice du Bon Dieu que de sa miséricorde. C'est parce qu'il est juste qu' « Il est compatissant et rempli de douceur, lent à punir et abondant en miséricorde. Car il connaît notre fragilité, Il se souvient que nous ne sommes que poussière. Comme un père a de la tendresse pour ses enfants, ainsi le Seigneur a compassion de nous (1)…».
(1) : Ps CII, 8, 14, 13.
Lettre au Père Roulland, 9 mai 1897 (LT 226).
A moi Il a donné sa Miséricorde infinie et c'est à travers elle que je contemple et adore les autres perfections Divines !... Alors toutes m'apparaissent rayonnantes d’amour, la Justice même (et peut-être encore plus que toute autre) me semble revêtue d’amour...
Manuscrit A. 84r.
Quelle douce joie de penser que le Seigneur est juste, c'est-à-dire qu'il tient compte de nos faiblesses, qu'il connaît parfaitement la fragilité de notre nature ! De quoi donc aurais-je peur ? Le bon Dieu infiniment juste, qui daigne pardonner avec tant de miséricorde les fautes de l'enfant prodigue, ne doit-il pas être juste aussi envers moi qui suis toujours avec lui (1) ?
(1) : Luc XV, 31.
Histoire d'une âme, ch. IX.
Je t'assure que le Bon Dieu est bien meilleur que tu le crois. Il se contente d’un regard, d'un soupir d’amour... Pour moi je trouve la perfection bien facile à pratiquer, parce que j'ai compris qu'il n'y a qu'à prendre Jésus par le Cœur... Regarde un petit enfant, qui vient de fâcher sa mère en se mettant en colère ou bien en lui désobéissant ; s'il se cache dans un coin avec un air boudeur et qu'il crie dans la crainte d'être puni, sa maman ne lui pardonnera certainement pas sa faute, mais s'il vient lui tendre ses petits bras en souriant et disant : « Embrasse-moi, je ne recommencerai plus. » Est-ce que sa mère pourra ne pas le presser contre son cœur avec tendresse et oublier ses malices enfantines ?... Cependant elle sait bien que son cher petit recommencera à la prochaine occasion, mais cela ne fait rien, s'il la prend encore par le cœur jamais il ne sera puni...
Lettre à Léonie, 12 juillet 1896 (LT 191).
Ah ! si toutes les âmes faibles et imparfaites sentaient ce que sent la plus petite de toutes les âmes, l'âme de votre petite Thérèse, pas une seule ne désespérerait d'arriver au sommet de la montagne de l'amour, puisque Jésus ne demande pas de grandes actions, mais seulement l'abandon et la reconnaissance…
Manuscrit B, 1 v°.
Je suis tout à fait de votre avis, « Le Cœur divin est plus attristé des mille petites indélicatesses de ses amis que des fautes même graves que commettent les personnes du monde » mais, mon cher petit frère, il me semble que c'est seulement quand les siens, ne s'apercevant pas de leurs continuelles indélicatesses s'en font une habitude et ne Lui demandent pas pardon, que Jésus peut dire ces paroles touchantes qui nous sont mises dans la bouche par l'Eglise pendant la semaine sainte : « Ces plaies que vous voyez au milieu de mes mains, ce sont celles que j'ai reçues dans la maison de ceux qui m'aimaient ! (1). » Pour ceux qui l'aiment et qui viennent après chaque indélicatesse Lui demander pardon en se jetant dans ses bras, Jésus tressaille de joie, Il dit à ses anges ce que le père de l'enfant prodigue disait à ses serviteurs : « Revêtez-le de sa première robe, mettez-lui un anneau au doigt, réjouissons-nous (2). » Ah ! mon frère, que la bonté, l'amour miséricordieux de Jésus sont peu connus !... Il est vrai que pour jouir de ces trésors, il faut s'humilier, reconnaître son néant, et voilà ce que beaucoup d'âmes ne veulent pas faire...
(1) : Zach. XIII, 6.
(2) : Luc XV, 22.
Lettre à l'Abbé Bellière, 26 juillet 1897 (LT 261).
C'est la confiance et rien que la confiance qui doit nous conduire à l'Amour… La crainte ne conduit-elle pas à la Justice (1) ?
(1) Note ajoutée par Thérèse (dans le texte, elle a biffé "à la Justice") : A la justice sévère telle qu'on la représente aux pécheurs mais ce n'est pas cette Justice que Jésus aura pour ceux qui l'aiment.
Lettre à Sœur Marie du Sacré-Cœur (LT 197).
Oui, je le sens (J’aime beaucoup cela lorsque Thérèse commence une phrase en disant : « Oui , je le sens » car cela me semble beaucoup plus fort que « oui, je le sais ». Thérèse le sent dans ses tripes), quand même j'aurais sur la conscience tous les péchés qui se peuvent commettre, j'irais le cœur brisé de repentir me jeter dans les bras de Jésus, car je sais combien Il chérit l'enfant prodigue qui revient à Lui. Ce n'est pas parce que le bon Dieu, dans sa prévenante miséricorde a préservé mon âme du péché mortel que je m'élève à Lui par la confiance et l'amour.
Conclusion du Manuscrit C.
On pourrait croire que c'est parce que je n'ai pas péché que j'ai une confiance si grande dans le bon Dieu. Dites bien, ma Mère, que, si j'avais commis tous les crimes possibles, j'aurais toujours la même confiance, je sens que toute cette multitude d'offenses serait comme une goutte d'eau jetée dans un brasier ardent. Vous raconterez ensuite l'histoire de la pécheresse convertie qui est morte d'amour ; les âmes comprendront tout de suite, car c'est un exemple si frappant de ce que je voudrais dire, mais ces choses ne peuvent s'exprimer.
Derniers entretiens, Carnet jaune, 11 juillet 1897.
Variante de l'Histoire d'une âme (cf. note 180 des Œuvres complètes) :
Ce n'est pas parce que j'ai été préservée du péché mortel que je m'élève à Dieu par la confiance et l'amour. Ah ! je le sens, quand même j'aurais sur la conscience tous les crimes qui se peuvent commettre, je ne perdrais rien de ma confiance ; j'irais, le cœur brisé de repentir, me jeter dans les bras de mon Sauveur. Je sais qu'il chérit l'enfant prodigue, j'ai entendu ses paroles à Sainte Madeleine, à la femme adultère, à la Samaritaine. Non, personne ne pourrait m'effrayer ; car je sais à quoi m'en tenir sur son amour et sa miséricorde. Je sais que toute cette multitude d'offenses s'abîmerait en un clin d'œil, comme une goutte d'eau jetée dans un brasier ardent.
Il est rapporté dans la Vie des Pères du désert, que l'un d'eux convertit une pécheresse publique dont les désordres scandalisaient la contrée entière. Cette pécheresse touchée de la grâce suivait le saint dans le désert pour y accomplir une rigoureuse pénitence, quand, la première nuit du voyage, avant même d'être rendue au lieu de sa retraite, ses liens mortels furent brisés par l'impétuosité de son repentir plein d'amour ; et le solitaire vit au même instant son âme portée par les Anges dans le sein de Dieu.
Voilà un exemple bien frappant de ce que je voudrais dire, mais ces choses ne peuvent s'exprimer…
Histoire d'une âme, ch. XI.
Une novice lui demandait si Notre-Seigneur n'était pas mécontent d'elle en voyant toutes ses misères. Elle lui répondit :
« Rassurez-vous : Celui que vous avez pris pour Époux a certainement toutes les perfections désirables ; mais, si j'ose le dire, il a en même temps une grande infirmité : c'est d'être aveugle ! Il est une science qu'il ne connaît pas : c'est le calcul. Ces deux grands défauts, qui seraient des lacunes fort regrettables dans un époux mortel, rendent le nôtre infiniment aimable.
S'il fallait qu'il y vît clair et qu'il sût calculer, croyez-vous qu'en présence de tous nos péchés, il ne nous ferait pas rentrer dans le néant ? Mais non, son amour pour nous le rend positivement aveugle !
Voyez plutôt : si le plus grand pécheur de la terre, se repentant de ses offenses au moment de la mort, expire dans un acte d'amour, aussitôt, sans calculer d'une part les nombreuses grâces dont ce malheureux a abusé, de l'autre tous ses crimes, il ne voit plus, il ne compte plus que sa dernière prière, et le reçoit sans tarder dans les bras de sa miséricorde.
Mais, pour le rendre ainsi aveugle et l'empêcher de faire la plus petite addition, il faut savoir le prendre par le cœur ; c'est là son côté faible… »
Conseils et souvenirs.
Lui ayant fait de la peine, une novice allait lui demander pardon. Sœur Thérèse de l'Enfant-Jésus parut très émue et lui dit :
« Si vous saviez ce que j'éprouve. Je n'ai jamais aussi bien compris avec quel amour Jésus nous reçoit, quand nous lui demandons pardon après une faute ! Si moi, sa pauvre petite créature, j'ai senti tant de tendresse pour vous, au moment où vous êtes revenue à moi, que doit-il se passer dans le cœur du bon Dieu quand on revient vers lui ?... Oui, certainement, plus vite encore que je ne viens de le faire, il oubliera toutes nos iniquités pour ne plus jamais s'en souvenir… Il fera même davantage : il nous aimera plus encore qu'avant notre faute !... »
Conseils et souvenirs.