dimanche 27 décembre 2015

La Sainte Famille

La Sainte Famille


La fête  de la Sainte Famille que nous vivons aujourd’hui, est une occasion de réfléchir sur la famille.

L’Église, depuis le Concile Vatican II, nous invite à réfléchir sur les signes des temps. Quand nous réfléchissons sur les signes des temps qui caractérisent notre époque, nous pouvons percevoir certaines modes et certaines attitudes, qui mettent en danger la famille.

Une de ces modes est l’hypersexualisation de nos sociétés occidentales. L’hypersexualisation est un phénomène de société où le sexe est omniprésent. Avec toutes ces tentations qui nous entourent et qu’on peut regarder par un simple clic d’ordinateur, il est certain que la vertu de chasteté est en grand danger. Sans compter le fait que presque personne aujourd’hui sait que pour être chrétien, il faut vivre chaste. Il y a une chasteté pour le célibataire, pour les gens mariés, pour le prêtre, le religieux et le consacré. Chasteté ne signifie pas virginité. 

Une attitude qui met en danger la famille, est l’individualisme. Tout le monde est d’accord pour dire ceci: alors qu’on peut si facilement communiquer avec autrui, il n’y a jamais eu aussi peu de vraie et véritable communication entre les gens. Et cela est grave car on peut facilement avoir l’illusion de communiquer. La vraie communication se vit en chair et en os, et en se regardant, si possible, droit dans les yeux.

Dans l'évangile proclamé à la messe aujourd'hui, nous voyons Jésus, âgé de 12 ans, faire une fugue. Personnellement, je ne vois d'autre façon de qualifier le fait que Jésus soit demeuré à Jérusalem à l'insu de ses parents, au terme de la fête de la Pâque. Après trois jours de recherche, Marie et Joseph, angoissés, retrouvent Jésus. Marie ne s'est pas rendu directement vers son fils, ne lui a pas tiré le bras et ne l'a pas ramené sans dire un mot dans les rangs de la caravane. Car on imagine que les hommes voyageaient séparément des femmes, lors des grands pèlerinages annuels. Non, Marie est entrée en relation avec Jésus et lui a posé une question: "Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela? Ton père et moi, angoissés, nous te cherchions" (Lc 2, 48). La réponse que le jeune Jésus donna à ses parents ce jour-là, Marie et Joseph ne la comprirent pas. Mais il y a eu échange et explications. Combien de mères de famille et de pères de famille, ont peur de nos jours, de demander des "pourquoi" à leurs enfants? Et combien d'époux et d'épouses ont peur de demander des "pourquoi" à leurs conjoints? Et pourtant l'amour ne se vit souvent qu'à ce prix-là. 

Il est très intéressant de noter qu’alors qu’on vit dans un siècle où la communication est difficile, l’Esprit Saint nous a donné un pape qui est un spécialiste de la communication.

Il y a une information qui circule concernant le pape. Je crois que c’est le pape lui-même qui nous a mis au courant de cela. Quand le pape prêche à une foule, quand il fait une homélie, par exemple, il regarde toujours une personne dans les yeux. Il ne quitte pas cette personne de vue. Pour lui, c’est comme si « parler en général », n’existait pas.

Une des caractéristiques du pape François, c’est de nous inciter sans cesse à vivre une spiritualité de la rencontre. Le pape veut qu’on aille à la rencontre des gens. Êtes-vous capable vous autres d’imaginer le pape assis dans un restaurant en face de quelqu’un et être en train de lire son journal ou de regarder sa tablette électronique? Cela est tout simplement impensable.

La famille est l’endroit où l’enfant apprend à vivre avec les autres. C’est l’apprentissage à vivre avec les autres qui est l’apprentissage fondamental de la famille. Une famille où les parents ne se parlent pas, est un désastre. Une famille qui ne passe jamais du temps ensemble, est condamnée à ne jamais grandir dans l'amour.

Il faut trouver du temps pour être ensemble. Vous n’y avez peut-être pas pensé, mais en venant à la messe aujourd’hui, vous avez voulu prier et louer Dieu non pas tout seul dans votre coin, mais avec d’autres personnes, vous avez voulu louer Dieu ensemble.

Il faut être conscient de ceci: lorsqu’on vit dans un monde, dans une société, nous sommes tous influencés par la façon de vivre de cette société. Tout le monde est influencé, même si on ne le réalise pas.

Je vis en communauté. Nous sommes trois Oblats de la Vierge Marie à vivre ensemble dans la même maison: Sylvain, Gérald et moi. Le danger, c’est de faire chacun notre petite affaire, chacun dans son coin. Heureusement, nous prions ensemble deux fois par jour, et nous mangeons la plupart du temps ensemble. C’est déjà beau. Est-ce que votre famille mange ensemble et prie ensemble?

Le Père Patrick Peyton, qui a consacré une grande partie de sa vie à implanter le chapelet en famille, a dit une phrase désormais célèbre : « A family that prays together, stays together » (« Une famille qui prie ensemble, reste ensemble »).

Mais aujourd’hui, manger ensemble et prier ensemble, n’est pas suffisant pour lutter contre notre monde individualiste. Il faut faire plus. Saint Ignace de Loyola nous enseigne que pour lutter contre une mauvaise habitude, il faut aller exagérément dans le sens contraire. C’est le fameux « agere contra » (« agir à l'encontre ». Nous, en communauté, nous avons ce qu’on appelle une réunion communautaire. Tous les dimanches soirs, nous nous réunissons pour une rencontre fraternelle de 90 minutes. Depuis quelque temps, nous avons opté pour la formule de partage propre aux Cellules Paroissiales d'Évangélisation. Durant ce temps, nous avons l'occasion de nous « dire en vérité et en toute sincérité ». Ces échanges sont de loin les moments les plus précieux du temps que tous les trois, nous passons ensemble. Être au courant de ce que l'autre vit en profondeur, ne peut que contribuer à construire la personnalité de chacun et à faire croître le respect mutuel. Or très souvent un de nous trois n'a pas du tout le goût de participer à la réunion. par fatigue ou, précisément, par individualisme. C'est là que la présence des autres est importante et que l'enracinement dans une saine résolution que nous avons prise ensemble, est capital. 

Je deviendrai une meilleure personne humaine, par mes contacts avec des humains. Si la grande majorité de mes rapports ont lieu avec une machine, avec un produit de la technologie, je deviendrai de moins en moins humain, je me déshumaniserai. Voilà un danger qui menace nos sociétés, car ce danger menace en tout premier lieu nos familles. Voir souffrir quelqu'un à la télévision, ce n'est pas du tout la même chose que de voir souffrir quelqu'un devant mes yeux. 


Il est intéressant de connaître la raison première pour laquelle le pape François a choisi le 8 décembre pour débuter le grand Jubilé de la Miséricorde. Au début de la bulle d’indiction du jubilé, le pape écrit:

« J’ai choisi la date du 8 décembre pour la signification qu’elle revêt dans l’histoire récente de l’Église. Ainsi, j’ouvrirai la Porte Sainte pour le cinquantième anniversaire de la conclusion du Concile œcuménique Vatican II. L’Église ressent le besoin de garder vivant cet événement. C’est pour elle que commençait alors une nouvelle étape de son histoire. Les Pères du Concile avaient perçu vivement, tel un souffle de l’Esprit, qu’il fallait parler de Dieu aux hommes de leur temps de façon plus compréhensible. » (Le Visage de la Miséricorde, no. 4).

Ce lien entre le jubilé et le Concile Vatican II est très intéressant. Le concile œcuménique Vatican II, a été essentiellement un concile « pastoral ». Sa préoccupation majeure était de parler à tous les êtres humains de la beauté de la foi, en un langage qui soit compréhensible pour chacun.

Il est bon aussi de noter qu’une grande partie de la première encyclique du pape Paul VI, qui est l’agent principal du Concile Vatican II (c’est vraiment lui qui a mené à bien l’inspiration du pape Jean-XXIII), porte sur le dialogue. Toute la dernière partie de l’encyclique Ecclesiam Suam (6 août 1964), porte sur la nécessité pour toutes les personnes de notre temps, de se parler. Et l’encyclique développe à merveille les conditions essentielles à tout dialogue productif. Voici quelques extraits de l’encyclique:

« Parce que missionnaire, l'Eglise doit entrer en dialogue avec le monde

66 - Si vraiment l'Église, comme Nous le disions, a conscience de ce que le Seigneur veut qu'elle soit, il surgit en elle une singulière plénitude et un besoin d'expansion, avec la claire conscience d'une mission qui la dépasse et d'une nouvelle à répandre. C'est l'obligation d'évangéliser. C'est le mandat missionnaire. C'est le devoir d'apostolat. Une attitude de fidèle conservation ne suffit pas. 

67 - L'Église doit entrer en dialogue avec le monde dans lequel elle vit. L'Église se fait parole; l'Église se fait message; l'Église se fait conversation.

68 - Cet aspect capital de la vie actuelle de l'Église fera, on le sait, l'objet d'une large étude particulière de la part du Concile œcuménique; et Nous ne voulons pas entrer dans l'examen concret des thèmes que cette étude se propose afin de laisser aux Pères du Concile le soin d'en traiter librement. Nous voulons seulement vous inviter, vénérables frères, à faire précéder cette étude de quelques considérations afin que soient plus clairs les motifs qui poussent l'Eglise au dialogue, plus claires les méthodes à suivre, plus clairs les buts à atteindre. Nous voulons préparer les esprits, non pas traiter les sujets.

83 - Le dialogue est donc un moyen d'exercer la mission apostolique ; c'est un art de communication spirituelle. Ses caractères sont les suivants :
1. - La clarté avant tout : le dialogue suppose et exige qu'on se comprenne; il est une transmission de pensée et une invitation à l'exercice des facultés supérieures de l'homme; ce titre suffirait pour le classer parmi les plus nobles manifestations de l'activité et de la culture humaine. Cette exigence initiale suffit aussi à éveiller notre zèle apostolique pour revoir toutes les formes de notre langage: celui-ci est-il compréhensible, est-il populaire, est-il, choisi?
2. - Un autre caractère est la douceur, celle que le Christ nous propose d'apprendre de lui-même: « Mettez. vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur » (Mt., 11, 29); le dialogue n'est pas orgueilleux; il n'est pas piquant; il n'est pas offensant. Son autorité lui vient de l'intérieur, de la vérité qu'il expose, de la charité qu'il répand, de l'exemple qu'il propose; il n'est pas commandement et ne procède pas de façon impérieuse. Il est pacifique; il évite les manières violentes; il est patient, il est généreux.
3. - La confiance, tant dans la vertu de sa propre parole que dans la capacité d'accueil de l'interlocuteur. Cette confiance provoque les confidences et l'amitié ; elle lie entre eux les esprits dans une mutuelle adhésion à un bien qui exclut toute fin égoïste.
84 - 4. - La prudence pédagogique enfin, qui tient grand compte des conditions psychologiques et morales de l'auditeur (cf. Mt., 7, 6): selon qu'il s'agit d'un enfant, d'un homme sans culture ou sans préparation, ou défiant, ou hostile. Elle cherche aussi à connaître la sensibilité de l'autre et à se modifier, raisonnablement, soi-même, et à changer sa présentation pour ne pas lui être déplaisant et incompréhensible.
85 - Dans le dialogue ainsi conduit se réalise l'union de la vérité et de la charité, de l'intelligence et de l’amour.

Ceci n’est qu’un résumé de la section de l’encyclique portant sur le dialogue. Pour lire la section au complet, veuillez vous rendre sur le lien mis au bas ce cette page.

Durant le Jubilé de la Miséricorde, essayons d’établir un dialogue vrai et amoureux avec toutes les personnes que nous rencontrerons. Ainsi sera construite la Famille humaine.  

Ecclesiam Suam (6 août 1964) | Paul VI

w2.vatican.va/content/paul-vi/.../hf_p-vi_enc_06081964_ecclesiam.html

  

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