lundi 30 décembre 2013

La porte sainte de Québec

La porte sainte de Québec
       

Si vous habitez au Québec, j’imagine que vous êtes au courant que la ville de Québec vit en ce moment une année jubilaire. Cette année de festivités a commencé le 8 décembre dernier, et se terminera le 28 décembre 2014, avec la fête de la Sainte Famille. Ce jubilé veut commémorer le 350ème anniversaire de la cathédrale de Québec, berceau de la foi catholique en Amérique du nord. J’ai déjà écrit sur mon blogue, un texte à ce sujet, le 9 décembre dernier. Voici d’autres détails sur la « porte sainte » de la cathédrale de Québec, la septième porte sainte qui existe dans le monde; la seule en dehors de l’Europe.

C’est le sculpteur montréalais Jules Lasalle, qui a réalisé la porte sainte de Québec. C’est un détail intéressant car c’est le même sculpteur qui a réalisé, en 1993, le tombeau en bronze de Mgr François de Laval qui se trouve à l’intérieur de la cathédrale de Québec. L’abbé Julien Guillot, directeur général des fêtes du 350ème anniversaire de Notre-Dame de Québec, dit que différents artistes ont été invités à présenter un projet de sculpture pour la porte sainte. Les membres du comité organisateur des fêtes, ont choisi le projet de M. Lasalle, en raison du caractère contemporain de la porte qu’il désirait sculpter. Alors que les autres portes saintes qui existent dans le monde, comportent des médaillons illustrant certains passages de la Bible, M. Louis Lasalle a opté pour la simplicité et la modernité. Sur le côté extérieur de la porte, il n’y a que Jésus, les mains ouvertes, dans une attitude d’accueil. Ses mains grandes ouvertes, nous invitent à passer par Lui pour aller vers le Père, selon cette phrase de Jésus: " Nul ne va vers le Père, sans passer par moi " (Jn 14, 6). Le Jésus sur la porte sainte, est le Christ ressuscité, et évoque le Christ que l'on retrouve dans la cathédrale, sur le baldaquin surplombant l'autel principal. 

De plus, Jésus n’a-t-il pas dit, dans l’évangile de saint Jean, qu’Il est « la porte des brebis » (Jn 10, 7-9)? Sur le côté intérieur de la porte, il y a Notre-Dame, entourée de gens qui symbolisent les communautés qui se sont succédées au cours des âges. Les personnes seules, les familles et les Amérindiens y sont représentés. M. Lasalle a voulu ainsi relié le présent au passé; ou le passé au présent. L’artiste a voulu une certaine sobriété dans la représentation de la porte sainte; et c’est ce caractère épuré qui a plu aux membres du comité organisateur.



Un des éléments les plus frappants de la porte, et peut-être même le plus original, c’est la croix de Jésus qui traverse ou transperce la porte. Ce trou dans la porte, ou cette ouverture dans la porte, est très significative pour le sculpteur. La croix unit l’intérieur et l’extérieur. C’est comme « une porte dans la porte ». Et même si la porte sainte demeure fermée durant des années, elle restera toujours en quelque sorte, un peu ouverte. Cette ouverture dans la porte, est aussi ce qui permet de faire passer la lumière. N'est-ce pas la Lumière de Pâques qui nous attend, au terme de notre pèlerinage terrestre, alors que, comme Jésus, nous passerons de ce monde au Père?

Une fois que nous avons franchi la porte sainte, nous nous retrouvons devant des reliques de nos saints et bienheureux (François de Laval, Kateri Tekakwitha, le Frère André, Marie de l’Incarnation, etc). Le soir de l’ouverture de la porte sainte, le 8 décembre dernier, ce sont ces reliques qui, en premier, ont franchi la porte. Quelques instants plus tard, Mgr Lacroix disait : « On a tenu à ce que ceux qui nous ont précédés dans la foi, passent en premier. Ce sont eux qui nous ont ouvert le chemin, en venant ici comme missionnaires pour y travailler et y donner leur vie. ». 

Au terme de l’année jubilaire, la porte ne sera pas « emmurée », mais simplement « scellée ». L’échafaudage construit pour permettre d’entrer par la porte, sera détruit. Peut-être la porte sainte sera-t-elle ouverte à nouveau dans dix ans (2024), pour commémorer le 350ème anniversaire du diocèse de Québec.

Je suis allé " passer par la porte sainte ", au lendemain de Noël. J'avoue avoir été déçu par la grandeur de la porte sainte et par la stature du Jésus représenté sur la façade extérieure de la porte. Je suis d'assez petite taille (5 pieds 8 pouces 1/2; 1 mètre 72) et le Christ est plus petit que moi. J'ai manifesté ma déception à l'abbé Julien Guillot, responsable du comité des fêtes du 350ème, et il m'a répondu que la Porte Sainte a une architecture volontairement petite, due à l'emplacement où elle se trouve. Si la Porte Sainte avait été placée sur la façade de la cathédrale, elle aurait pu avoir un autre format. Mais là où elle est placée, elle respecte l'architecture et la proportion des lignes. C'est une porte spécialement conçue en tenant compte de l'architecture de la chapelle du Sacré-Coeur où elle est située. L'abbé Guillot a ajouté que le sens que l'on a voulu donner à la grandeur de la porte, est en lien avec cette phrase de Jésus: " Efforcez-vous d'entrer par la porte étroite " (Lc 13, 24). Il s'agit de " se libérer de ce qui alourdit nos vies " avant de passer la porte étroite.

J'ajoute un mot à ce texte. Nous sommes le 12 janvier 2014, en la fête du Baptême du Seigneur. Un de mes bons amis paroissiens est allé à Québec ces jours-ci, et a vécu l'expérience de la Porte Sainte. Voici son compte-rendu:

Le 11 janvier 2014, Jean-Jacques a écrit :

Bonjour Guy,

Récemment tu as parlé de la Porte Sainte de Québec. Nous sommes allés à Québec cette semaine et je me suis rendu à la cathédrale pour entrer par cette Porte Sainte. Pour ma part, j'ai été impressionné par la qualité de cette porte, sculptée par un québécois dont le métal repoussé représente bien le Christ à l'extérieur et la Vierge Marie à l'intérieur. J'ai passé cette porte en étant touché par la symbolique qui nous est présentée  ...   j'ai senti une paix intérieure guidé par la foi.

Merci de nous en avoir parlé et d'avoir aiguisé ma curiosité  ...  pour ma part je n'ai pas été déçu.

Amitié, 

Jean-Jacques


Photo: à gauche: la représentation de Jésus sur la côté extérieur de la porte sainte; à droite: l'archevêque de Québec, Mgr Gérald Cyprien Lacroix, en ce début d'année jubilaire.




lundi 23 décembre 2013

Mes voeux en ce Noël 2013

Mes vœux en ce Noël 2013

Chers amis, voici mes vœux, ou mes désirs, pour vous et pour moi, en ce Noël 2013 : que nous comprenions toujours mieux ce que c’est que d’être chrétiens et que nous éprouvions de plus en plus une immense fierté d’avoir été choisis par Dieu pour être incorporés au Christ Sauveur. Le baptême est avant tout une incorporation au Christ : nous entrons dans son corps, nous faisons partie de son corps. Le baptême a fait de nous des membres du Christ ressuscité et Sauveur. En Lui, nous devons vivre en ressuscités et contribuer à notre tour, à sauver notre pauvre monde : « Je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son Corps, qui est l'Église » (Col 1, 24). 

Mais pour que nous puissions être « incorporés » au Christ, il fallait d’abord que le Verbe se fasse chair, que le Fils éternel du Père, coéternel avec le Père et l’Esprit-Saint, prenne corps et s’unisse à jamais à notre nature faible et mortelle. C’est grâce à cette incorporation du Fils de Dieu à notre nature, que nous pouvons à notre tour, faire corps avec Lui. C’est cet abaissement du Fils de Dieu, cette humiliation et cet anéantissement (pour reprendre une expression  utilisée par saint Paul) du Fils de Dieu, que nous célébrons à Noël et que nous sommes invités à vivre et à imiter jusqu’à notre mort : « Le Christ Jésus, ayant la condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu, mais il s’est anéanti, prenant la condition d’esclave, et devenant semblable aux hommes. S’étant comporté comme un homme, il s’humilia plus encore, obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix! C’est pourquoi Dieu l’a exalté et lui a  donné le Nom qui surpasse tous les noms, afin qu’au nom de Jésus, tout genou fléchisse, au ciel, sur terre et aux enfers, et que toute langue proclame : « Jésus Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père » (Phil 2, 6-11)

Lorsque j’entends certains de mes compatriotes qui travaillent à la radio ou à la télévision, parler de la religion catholique, ils la qualifient souvent de religion du sacrifice, de religion qui fait l’éloge de la souffrance. Et parce que ces personnes ne perçoivent pas du tout la valeur intrinsèque du sacrifice de Jésus et de tout sacrifice vécu avec Jésus et pour Jésus,  elles se disent  tellement heureuses d’avoir mis de côté la religion de leurs ancêtres. Ces gens ont tout à fait raison de percevoir le sacrifice comme faisant partie intégrale de la religion catholique. Cela est tout à fait vrai. Mais la religion catholique n’est pas masochiste. Un masochiste aime la souffrance pour la souffrance. Nous, les catholiques, nous n’aimons pas la souffrance, pour la souffrance. Nous aimons la souffrance comme moyen de transformation intérieure, comme moyen de partager la vie de Jésus, la vie divine, comme moyen, en somme, d’être divinisés. C’est le rêve de l’être humain, depuis ses origines, de devenir un Dieu, d’être comme Dieu. Mais alors que l’être humain, laissé à ses seules lumières naturelles, en vient à penser que le moyen d’être comme Dieu, est de pouvoir décider par lui-même de ce qui est bien, et de ce qui est mal, ou encore, de faire uniquement ce qui lui plaît, le chrétien, lui. a une tout autre conviction, une tout autre vision. Le chrétien sait et croit que l’unique moyen de s’unir à la vie divine, est le renoncement à sa nature pécheresse. Le moyen le plus sûr pour le chrétien de partager la vie divine, depuis que Dieu s’est fait homme, c’est d’aller contre sa nature sensible, et d’imiter Dieu dans son abaissement et son renoncement.

Le Père Raniero Cantalamessa a donné un enseignement magistral, le 6 décembre dernier, au pape et à la curie romaine. Il a essayé de montrer comment saint François d’Assise a renouvelé l’Église par la voie de la sainteté. C’est uniquement la sainteté qui renouvellera le monde. Mais la question est la suivante : qu’est-ce que la sainteté? Le Père Cantalamessa, capucin et fils de saint François, a montré très clairement que saint François s’est approché de la  sainteté, le jour où, allant contre la nature sensible en lui, il a embrassé un lépreux. J’ai cité ce passage dans mon blogue du 17 décembre dernier, intitulé : François et François.

Voici maintenant, une autre portion de ce magnifique enseignement du Père Cantalamessa :

Comment imiter François?
Qu’est-ce que l’expérience de François nous dit aujourd’hui ? Que pouvons-nous imiter chez lui, tous, et tout de suite ? Aussi bien ceux que Dieu appelle à réformer l’Église par la sainteté, que ceux qui se sentent appelés à la renouveler par la critique, ou ceux que lui-même appelle à la réformer par les charges qu’ils recouvrent ? La même chose que le point de départ de l’aventure spirituelle de François: sa conversion du « moi » à Dieu, son renoncement à lui-même. C’est ainsi que naissent les vrais réformateurs, ceux qui changent vraiment quelque chose dans l’Église. Ceux qui meurent à eux-mêmes. Mieux, ceux qui décident sérieusement de mourir à eux-mêmes, sachant qu’il s‘agit d’une démarche qui dure toute la vie, voire au-delà d’elle, si, comme le disait sainte Thérèse d’Avila en plaisantant, notre amour propre meurt vingt minutes après nous.

Une saint moine orthodoxe, Silouane du Mont Athos, disait ceci: « Pour être vraiment libres, il faut commencer par se lier soi-même ». Des hommes comme eux sont libres de la liberté de l’Esprit; rien ne les arrête et plus rien ne leur fait peur. Ils deviennent des réformateurs par la voie de la sainteté, et pas seulement par leur charge. Mais que  signifie la proposition de Jésus de renoncer à soi-même ? Est-ce toujours possible de le proposer à un monde qui ne parle que de réalisation de soi, d’affirmation de soi? Le renoncement n’est jamais une fin en soi, ni un idéal en soi. La chose plus importante, c’est ce qui est positif: " Si quelqu’un veut venir avec moi " a dit Jésus; c’est suivre le Christ, posséder le Christ. Dire non à soi-même, c’est le moyen; dire oui au Christ, c’est la fin. Paul le présente comme une sorte de loi de l’esprit: « Si, par l’Esprit, vous tuez les désordres de l’homme pécheur, vous vivrez » (Rm 8,13). C’est, on le voit, un « mourir » pour vivre, à l’opposé de la vision philosophique existentielle selon laquelle la vie humaine est « un vivre pour mourir » (Heidegger).

Il s’agit de savoir quel fondement nous voulons donner à notre existence : notre « moi » ou le « Christ »; dans le langage de Paul, si nous voulons vivre « pour nous-mêmes », ou « pour le Seigneur » (cf. 2 Co 5,15; Rm 14, 7-8). Vivre « pour soi-même » signifie vivre selon ses propres commodités, sa propre gloire, son propre avancement ; vivre « pour le Seigneur » signifie toujours remettre à la première place, dans nos intentions, la gloire du Christ, les intérêts du Royaume et de l’Eglise.
Chaque « non », petit ou grand, dit à soi-même par amour, est un « oui » dit au Christ.

Il faut seulement éviter de se faire des illusions. Il ne s’agit pas de tout savoir sur le renoncement chrétien, sa beauté et sa nécessité; il s’agit de passer à l’acte, de le mettre en pratique. Un grand maître de l’esprit des temps anciens  disait: « Il est possible de briser dix fois sa propre volonté en un temps très bref ; et je vous dis comment. Une personne se promène et voit quelque chose; sa pensée lui dit: « Regarde là », mais lui répond à sa pensée: « Non, je ne regarde pas », et il brise sa volonté. Puis il rencontre d’autres personnes qui sont en train de parler en mal de quelqu’un, peut-être du supérieur, et sa pensée lui dit : « Dis toi aussi ce que tu sais », et il brise sa volonté en se taisant » (1). Ce Père des temps anciens apporte, comme on le voit, des exemples qui sont tous tirés de la vie monastique. Mais ceux-ci peuvent s’actualiser et s’adapter facilement à la vie de chacun, clercs et laïcs. Vous ne rencontrerez peut-être pas comme François un lépreux, mais un pauvre qui, vous le savez, vous demandera quelque chose; le vieil homme qui est en vous vous pousse à passer de l’autre côté de la rue, mais vous, vous vous faites violence et vous allez à sa rencontre, en ne lui offrant peut-être qu’un salut et une poignée de main, si vous ne pouvez rien de plus. L’occasion d’un gain illicite se présente à vous: vous dites non, et vous avez renoncé à vous-mêmes. Vous avez été contredit dans une de vos idées; piqué au vif, vous voudriez répliquer vivement, vous vous taisez et attendez: vous avez brisé votre « moi ». Vous croyez avoir reçu un tort, un traitement, ou une tâche non adaptés à vos mérites ; vous voudriez le faire remarquer  à tout le monde, en vous enfermant dans un silence plein de tacite reproche. Vous dites non, vous brisez le silence, vous souriez et vous rouvrez le dialogue. Vous avez renoncé à vous-mêmes et sauvé la charité. Et ainsi de suite.

Un objectif difficile à atteindre (je ne parle certes pas comme quelqu’un qui y serait arrivé!), mais ce qui est arrivé à François, nous a montré ce qui peut naître d’un renoncement de soi réalisé en réponse à la grâce. L’objectif final à atteindre est de pouvoir dire comme Paul et avec lui: « Ce n’est plus moi qui vis, c’est Christ qui vit en moi ». Et cette terre sera alors déjà comblée de joie et de paix. Saint François, avec sa «joie parfaite», est un témoin vivant de la « joie qui vient de l’Évangile, de l’«Evangelii Gaudium » dont nous parle le pape François dans sa récente Exhortation apostolique.
(Tiré de l’enseignement du Père Raniero Cantalamessa, du 6 décembre 2013, intitulé: FRANÇOIS D’ASSISE ET LA RÉFORME DE L'ÉGLISE PAR VOIE DE SAINTETÉ)

(     (1) Dorothée de Gaza, Oeuvres spirituelles, I,20 (SCH 92,p.177).


samedi 21 décembre 2013

Michael Lonsdale

Michael Lonsdale
(1931 -   )


Je suis en train de lire un merveilleux petit livre : Jésus, j’y crois, écrit par Michael Lonsdale. Ce nom ne vous dit peut-être pas grand-chose, si vous habitez hors de la France. Mais si vous avez vu le merveilleux film de Xavier Beauvois, intitulé Des hommes et des dieux, vous retracerez facilement qui est Michael Lonsdale. Le film Des hommes et des dieux, retrace la vie de huit moines cisterciens vivant à Tibhirine, en Algérie, qui ont témoigné de l’amour de Dieu en pays musulman, au péril de leur vie. De fait, sept d’entre eux mourront assassinés en 1996. L’acteur Michael Lonsdale interprète le rôle d’un des moines : le très sympathique frère Luc, médecin totalement dévoué à ses patients.  

Michael Lonsdale est un comédien et non pas un théologien. Je ne partage pas toutes ses idées théologiques, mais j’admire beaucoup son amour pour Jésus et son grand désir de témoigner de sa foi.

Voici les tout premiers mots du livre Jésus, j’y crois :

« Jésus est le cœur de la lumière, la source de toute respiration humaine. Cet homme est pour moi la vérité qui ne peut mentir. J’ai lu beaucoup de grands textes spirituels, je me suis intéressé à différentes religions et sagesses, musulmanes, bouddhistes ou venant de l’Inde … Il y a de très belles choses dans les Upanishads, dans le bouddhisme, et sans doute chez les philosophes que j’ai du mal à lire. Avec le Christ, voici la seule religion où il est question d’amour avant tout. Il n’y a pour moi rien de plus fort que les paroles de Jésus. …

 De toute ma vie, ce que j’ai lu de plus vrai, c’est l’Évangile. La parole de Jésus est la plus juste, celle qui suscite le plus de vie. Il est source de bonté, de générosité chez les êtres humains. Et cette générosité, ce souci des autres avant soi, me touche profondément. Ce don de soi hérité de Jésus, j’y crois dur comme fer. Je me promène souvent avec ma petite bible dans mon sac : je peux la lire n’importe quand, n’importe où, dans le métro, en voyage … Je suis plongé dedans : j’écoute le Christ, je n’ai besoin de rien d’autre » (Michael Lonsdale, Jésus j’y crois, Bayard 2013, pp. 7-9).

Voilà pour son amour de Jésus. Et maintenant, voici quelques mots sur son désir de témoigner, d’évangéliser :

« La foi est un trésor qui se transmet, et ma manière de la partager passe par la scène. Ce n’est plus un travail : c’est ma façon de répondre à l’appel du Christ. Il y a tant à faire, et c’est un tel bonheur que de partager la lecture du Cantique des cantiques ou du livre de Job pour faire connaître l’amour de Dieu. Mais nous sommes tous invités à témoigner de notre foi : quand nous sortons de nos célébrations dominicales, nous devrions être secoués et vivants. Cela devrait se voir sur nos visages … La foi nous donne envie d’aimer Dieu, et d’aimer nos frères. Pourquoi ne sommes-nous pas plus joyeux, généreux, amoureux? Notre adhésion doit être complète : c’est notre manière d’être qui devrait être littéralement transpercée par notre foi en Jésus. Notre cœur n’attend que cette étincelle, mais nous sommes trop souvent timorés. Il faut éveiller les cœurs, car c’est l’amour qui sauvera le monde! » (Ibid, pp. 58-59)

Michael Lonsdale a bien raison de mentionner l’envoi missionnaire qui se vit au terme de chaque eucharistie. Lorque le prêtre prononce les paroles suivantes : « Allez dans la paix du Christ », il n’a pas d’abord à l’esprit d’inviter les gens à sortir de l’église; il les envoie littéralement en mission; il les envoie porter la paix du Christ à toute personne qu’ils rencontreront sur leur chemin durant la semaine. Les catholiques ne sont pas suffisamment conscients et convaincus d’être des missionnaires. La mission devrait se vivre dès que nous franchissons la porte de l’église et que nous mettons le pied sur le parvis. J’aime beaucoup le nom qu’a donné en 2011, le Conseil pontifical de la culture, à une nouvelle structure de dialogue entre croyants et non croyants, nommée : le Parvis des Gentils.

Dans le film Des hommes et des dieux, une des plus belles scènes du film, selon moi, est la rencontre entre une jeune fille nommée Rabbia et le frère Luc (joué par Michael Lonsdale). La jeune fille venait, semble-t-il, de connaître l’amour, et demande au frère Luc : « Comment c’est, quand on est vraiment amoureux? ». S’en suit une belle discussion sur l’amour. Dans le livre Jésus j’y crois, Michael Lonsdale nous révèle un fait étonnant à propos de cette scène. Le magnifiques propos que tient l’acteur à la jeune fille, n’étaient pas écrits dans le scénario. Le réalisateur du film, a simplement demandé à Michael Lonsdale, d’improviser:

« Dans la scène durant laquelle j’explique à la jeune fille ce qu’est l’amour, Xavier Beauvois m’a demandé d’improviser. J’ai dit ce que j’avais dans le cœur. Je ne sais pas ce qu’aurait répondu frère Luc, mais je crois qu’il aurait dit quelque chose d’assez proche. C’était impressionnant de donner sa voix à une figure si dépouillée, si vraie, si près de la sainteté. À quatre-vingts ans, frère Luc est un des très beaux rôles que j’ai eu à jouer dans ma carrière : c’est un être de pure générosité, une des plus belles trajectoires de la foi que je connaisse. Sa vie à Tibhirine, entre la prière et les soins apportés à tous ceux qui  venaient voir le médecin, est un consentement à l’une des plus belles phrases des Évangiles : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » (Ibid, pp. 54-55)

Extraordinaire, n’est-ce pas? Cela montre que la vie intérieure de Michael Lonsdale transparaît dans tout son être. Xavier Beauvois (le réalisateur du film) savait par instinct et par intuition, que Michael Lonsdale connaissait le véritable amour et serait capable d’en parler. C'est tout simplement merveilleux. Vous pouvez visionner le magnifique film Des hommes et des dieux, gratuitement sur internet, en cliquant sur le lien ci-dessous (1).

Vous pouvez entendre Michael Lonsdale réciter un de mes poèmes préférés de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus, intitulé " Rien que pour aujourd'hui ", en cliquant sur les mots suivants: "Rien que pour aujourd'hui" par Michael LONSDALE - Forum ...

La chaîne de télévision française KTO a fait quelques interviews avec Michael Lonsdale. Vous pouvez facilement les visionner sur internet. En voici une : 
  1. Michael Lonsdale - YouTube

    www.youtube.com/watch?v=Swi4bjD5yDo
    20 oct. 2012 - Ajouté par KTOTV
    Pour les croyants comme pour les non-croyants, il est l'acteur qui transcende et qui sait mieux que quiconque ...


  1. fr.gloria.tv/?media=150700
    28 avr. 2011
    Testament du Père Christian de Chergé Date de sortie cinéma : 8 septembre 2010 Film déjà disponible en DVD depuis le : 23 février 2011 Film  ...

jeudi 19 décembre 2013

Malaisie

Malaisie

Chers amis,

Avoir un blogue, est une expérience fascinante. Je considère que mon blogue est la meilleure façon dont j’exerce en ce moment mon ministère presbytéral (sacerdotal). Je suis curé de paroisse à Montréal, mais je n’ai pas l’impression d’avoir les aptitudes requises pour être un bon curé de paroisse. J’espère pouvoir répondre le plus tôt possible au désir de notre cher pape François et de trouver des moyens de rejoindre les gens qui sont à la « périphérie » de l’Église, c’est-à-dire de rejoindre les « distants ». Ici, à Montréal, j’ai la charge d’une paroisse qui a trois églises sur son territoire. Peu de gens viennent me voir. J’ai l’impression que les gens sont gênés de venir, par crainte de me « déranger ». J’ai beau leur dire et leur répéter que jamais ils ne me dérangeront, cela ne fait pas de différence. J’ai même dit dernièrement à mes paroissiens qu’une parole de Jésus m’interpelle beaucoup comme pasteur : « Je suis le bon pasteur; je connais mes brebis et mes brebis me connaissent » (Jn 10,14). J’ai avoué à mes paroissiens que je ne les connaissais pas, et que je désirais les connaître. Je leur ai dit que je voulais les rencontrer et qu’on pourrait pour cela prendre un café ensemble, soit chez eux, soit chez moi, ou dans un restaurant tout près d’ici. Je leur ai donné quinze jours pour me contacter à cet effet et pour prendre rendez-vous, espérant remplir un peu mon agenda par des rencontres. Après les quinze jours, je leur ai dit que j’irais voir certains d’entre eux, avant la messe dominicale, pour m’inviter moi-même à la rencontre; ils auraient alors le choix de l’accepter ou de la décliner. Les quinze jours sont passés et trois personnes m’ont invité à les rencontrer. Une d’elle m’a dit qu’elle préférait m’inviter plutôt que de vivre l’embarras de me voir arriver dans son banc un dimanche et me voir m’inviter moi-même.

Je célèbre très peu de mariages dans une année et ils ont pratiquement toujours lieu durant l’été. Presque personne ne vient au sacrement de la réconciliation. J’avoue que je ne suis pas « disponible », de façon évidente et à moments fixes (avant les messes, par exemple) pour faciliter la rencontre avec Jésus dans ce sacrement. Mais c’est un fait que les gens au Québec, depuis de nombreuses années, « se confessent » très peu. C’est vraiment malheureux car c’est un si beau sacrement. Je vais personnellement recevoir régulièrement ce sacrement. Il y a un sanctuaire dédié au Sacré-Coeur de Jésus à dix minutes d’automobile de la paroisse, où il est très facile de recevoir le sacrement de la réconciliation; un prêtre Capucin est toujours disponible à cet effet. C’est là que mon confesseur habite. Je n’ai même pas une moyenne d’une funérailles par semaine dans ma paroisse, qui comprend tout de même trois églises. Alors que fait Guy Simard de son temps? Il écrit et envoie par internet ses intuitions et ce qui le touche. Heureusement que le Seigneur me donne ce moyen de faire du bien. Ma consolation est de savoir que certains de mes paroissiens me lisent régulièrement. J’ai ainsi l’impression de faire du bien pour mes chers paroissiens.

Une des choses qui me fascinent sur mon blogue, c'est de pouvoir savoir à chaque jour, en quels endroits de la planète, je suis lu. C'est vraiment extraordinaire ce que la technologie peut faire de nos jours. Depuis quinze jours, environ, c’est en Malaisie, au bout du monde, que je suis le plus lu. Voir les statistiques ci-dessous. Cela m’émerveille.  

Statistiques des pages vues sur mon blogue, durant la dernière semaine :

Semaine du 12 déc. 2013 04:00 – 19 déc. 2013 03:00

Pages vues par pays


Entrée
Pages vues
Malaisie
287
Canada
262
États-Unis
106
France
81
Allemagne
19
Suisse
8
Serbie
4
Belgique
3
Maroc
3
Moldavie
2



 

mardi 17 décembre 2013

François et François

François et François

Nous savons tous que le cardinal Bergoglio a choisi le nom de François une fois devenu pape, en l’honneur du « Poverello » d’Assise. Il y a de nombreuses similitudes entre François d’Assise et notre pape : l’amour de la pauvreté, l’audace de réprimander évêques et haut clergé pour leur vie qui s’éloigne de la simplicité et de la pauvreté évangéliques, un langage simple et imagé pour faire comprendre les vérités les plus sublimes, etc. Un événement assez récent s’est produit sur la place Saint-Pierre, qui nous a fait « voir » à quel point le pape François est mû par le même Esprit qui a gouverné la vie du pauvre d’Assise. Le 6 novembre dernier, à la fin d’une audience générale, le pape François, comme à son habitude, est descendu à la rencontre des malades pour les saluer et les bénir. Il a alors fait la rencontre de Vinicio Riva, un homme de 53 ans, totalement défiguré. Le pape l’a embrassé longuement.  


Touching moment: The pontiff kissed Mr Riva, who suffers from a rare disease called neurofibromatosis, which is genetic and not contagious 


 Touching moment: The pontiff kissed Mr Riva, who suffers from a rare disease called neurofibromatosis, which is genetic and not contagious

Vinicio Riva, from Vicenza in northern Italy, is covered from head-to-toe by the growths, a symptom of his genetic disease, neorofibramatosis  

Laissons la parole à Vinicio :

« Je lui ai d’abord embrassé la main, pendant qu’avec l’autre main, il me caressait la tête et les plaies. Et puis il m’a attiré contre lui, en me serrant fort et en m’embrassant le visage. J’avais la tête contre son buste, et ses bras m’enveloppaient. Et lui me tenait serré, serré, comme s’il me câlinait, il ne se détachait plus. J’ai cherché à parler, à lui dire quelque chose, mais je n’ai pas réussi : l’émotion était trop forte. Cela a duré un peu plus d’une minute, mais cela m’a semblé une éternité. Les mains du pape sont si tendres. Tendres et belles. Et son sourire limpide et ouvert. Mais ce qui m’a le plus impressionné, c’est qu’il n’a pas réfléchi à deux fois pour savoir s’il devait m’embrasser ou pas. Je ne suis pas contagieux mais il n’en savait rien. Il l’a fait et voilà : il m’a caressé tout le visage, et pendant qu’il le faisait, je ne ressentais que de l’amour. »

Originaire d’Isola, un petit village de la Province de Vincenza (Italie), il vit avec sa petite sœur Morena et leur tante Caterina, leur tutrice. Comme sa sœur (dans une forme moins sévère), il est atteint de la maladie de Recklinghausen depuis l’âge de 15 ans. Il s’agit d’une maladie rare, connue comme « neurofibromatose de type 1 », qui provoque de douloureuses excroissances sur tout le corps. Aucun traitement ne peut actuellement guérir cette maladie. … A Isola, Vinicio est accepté par pratiquement tout le monde. Il a son groupe d’amis, avec lequel il va manger une pizza ou voir des parties de foot. Et il courtise toutes les infirmières, dépensant en fleurs une partie des 130 euros qu’il gagne chaque mois en travaillant dans une maison de retraite ((Tiré de Panorama, article signé par Marine Soreau)

Quiconque connaît un peu la vie de François d’Assise, sait que divers événements sont à l’origine de sa conversion. Parmi ces événements, le plus marquant semble avoir été le jour où François, allant contre son inclination naturelle, embrassa un lépreux. Il n’est pas facile d’interpréter correctement ce qui s’est passé dans le cœur de François d’Assise, ce jour-là. Mais je crois que l’enseignement qu’a donné le Père Raniero Cantalamessa (capucin, et donc disciple de saint François) ces jours-ci à Rome, peut nous aider grandement à comprendre la vie de saint François d’Assise. Voici quelques extraits de cet enseignement :

Saint François d'Assise et la réforme de l'Eglise par voie de sainteté

Première prédication de l'Avent  Rome, 7 décembre 2013 (Zenit.org) P. Raniero Cantalamessa O.F.M.Cap. 

 

La conversion de François.

Pour comprendre quelque chose de l’aventure de François il faut partir de sa conversion. Il existe, dans les sources, diverses descriptions de cet événement, avec des différences considérables. Heureusement, nous avons une source absolument fiable qui nous dispense de choisir entre les différentes versions. Nous avons le témoignage de François lui-même dans son Testament, son ipsissima vox, comme on dit des paroles certaines du Christ rapportées dans l’Évangile. Il dit :

« Voici comment le Seigneur me donna, à moi frère François, la grâce de commencer à faire pénitence: Au temps où j’étais encore dans les péchés, la vue des lépreux m’était insupportable. Mais le Seigneur lui-même me conduisit parmi eux ; je les soignai de tout mon cœur ; et au retour, ce qui m’avait semblé si amer s’était changé pour moi en douceur pour l’esprit et pour le corps. Ensuite j'attendis peu, et je dis adieu au monde. »

C’est sur ce texte, à juste titre, que les historiens se fondent, mais avec une limite infranchissable pour eux. Même les mieux intentionnés d'entre eux et les plus respectueux de la particularité de ce qui est arrivé à François - comme l'a été, parmi les Italiens, Raoul Manselli -, n’arrivent pas à saisir la raison ultime de son changement radical. Ils s’arrêtent – pour respecter leur méthode – sur le seuil, parlant d’un « secret de François », destiné à rester tel à jamais.  …  

Le vrai choix est beaucoup plus radical: il ne s’agit pas de choisir entre richesse et pauvreté, ni entre riches et pauvres, entre l’appartenance à une classe plus qu’à une autre, mais de choisir entre soi-même et Dieu, entre sauver sa vie ou la perdre pour l’Evangile.

Il y a ceux (par exemple, à une époque plus proche de la nôtre, Simone Weil) qui sont arrivés au Christ en partant de leur amour des pauvres et d’autres qui sont arrivés aux pauvres en partant de leur amour du Christ. François appartient à cette seconde catégorie. La raison profonde de sa conversion n’est pas de nature sociale, mais évangélique.  Jésus en avait fait une loi une fois pour toutes en prononçant une des phrases les plus solennelles et les plus sûrement authentiques de l’Évangile : « Si quelqu'un veut marcher derrière moi, qu'il renonce à lui-même, qu'il prenne sa croix et qu'il me suive. Car celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perd sa vie à cause de moi la gardera » (Mt 16, 24-25).

François, en embrassant le lépreux, a renoncé à lui-même dans ce qu'il y avait de plus « amer » et ce qui répugnait le plus à sa nature. Il s’est fait violence. Ce détail n’a pas échappé à son premier biographe qui décrit l’épisode de la façon suivante : « Un jour, il rencontra un lépreux sur sa route : se faisant violence, il s’approcha de lui et lui baisa la main. À partir de ce moment-là, il se mit à se mépriser de plus en plus, jusqu’à parvenir à une parfaite victoire sur lui-même par la grâce de Dieu ».
François n’est pas allé spontanément chez les lépreux, poussé par une compassion humaine et religieuse. « Le Seigneur, écrit-il, m’a conduit parmi eux ». C’est sur ce petit détail que les historiens ne savent – ni ne pourraient – porter un jugement, alors qu'il est à l’origine de tout. Jésus avait préparé son cœur de manière à ce que sa liberté, au bon moment, réponde à la grâce. C’est à cela qu’avaient servi le songe de Spolète et la question sur qui il préférait servir le serviteur ou le maître, la maladie, l’emprisonnement à Pérouse et cette étrange inquiétude qui ne lui permettait plus de trouver de la joie dans les divertissements et lui faisait rechercher des lieux solitaires. Même sans penser que Jésus en personne se cachait sous les traits du lépreux (comme plus tard on essaya de faire, en référence au cas analogue de la vie de saint Martin de Tours), à ce moment là le lépreux pour François représentait en tous points Jésus. Ce dernier n’avait-il pas dit: « C'est à moi que vous l'avez fait » ? A ce moment-là, il a choisi entre lui-même et Jésus. La conversion de François est du même ordre que celle de Paul. Pour Paul, à un certain moment, ce qui  avait été auparavant un « avantage » changea de signe et devint une « perte », « à cause du Christ » (Ph 3, 5 ss.); pour François ce qui était amer se transforma en douceur, là aussi « à cause du Christ ». Après ce moment, tous les deux peuvent dire: « Ce n’est plus moi qui vit mais le Christ qui vit en moi ».

Tout ceci nous oblige à corriger une certaine image de François rendue populaire par la littérature postérieure et accueillie par Dante dans la Divine Comédie. La fameuse métaphore des noces de François avec Dame Pauvreté qui a laissé des marques profondes dans la poésie et l’art franciscains peut se prêter à confusion. On ne tombe pas amoureux d’une vertu, fût-ce de la pauvreté même; on s’éprend d’une personne. Les  noces de François furent, comme chez d’autres mystiques un mariage avec le Christ. À ses compagnons qui lui demandaient s’il comptait « prendre épouse » après l’avoir vu un soir étrangement absent et lumineux, le jeune François répondit: « Je prendrai l’épouse la plus noble et la plus belle que vous ayez jamais vue ». D’habitude, ce genre de réponse est mal interprété. Si l'on regarde le contexte, il est clair que l’épouse n’est pas la pauvreté, mais un trésor caché et une perle rare, c’est-à-dire le Christ. « L’Épouse, commente Thomas de Celano qui rapporte l’épisode, est la vraie religion que celui-ci embrassa; et le royaume des cieux est le trésor caché qu’il cherchait ».

François n’épousa ni la pauvreté, ni même les pauvres; il épousa le Christ et c’est par amour pour Lui qu’il épousa, pour ainsi dire « en secondes noces », Dame Pauvreté. Il en sera toujours ainsi dans la sainteté chrétienne. Au fondement de l’amour de la pauvreté et des pauvres, il y a l’amour du Christ, ou alors les pauvres seront d’une façon ou d’une autre instrumentalisés et la pauvreté deviendra facilement un fait polémique contre l’Église, ou une ostentation de plus grande perfection par rapport aux autres dans l’Église, comme cela arriva, hélas, aussi à certains disciples du Poverello. Dans l’un ou l’autre cas, on fait de la pauvreté la pire des formes de richesse, celle de sa propre justice.




lundi 16 décembre 2013

Les 3 causes de toute joie

Les 3 causes de toute joie

Hier, dans toute l’Église, nous vivions le dimanche appelé : « Gaudete » (mot latin signifiant : « Réjouissez-vous »). Ce dimanche du milieu de l’Avent est ainsi nommé en raison tout d’abord, des tout premiers mots de la messe de ce jour. En effet, l’antienne d’ouverture de la messe est celle-ci : « Soyez dans la joie du Seigneur, soyez toujours dans la joie, le Seigneur est proche » (Ph 4, 4.5). Mais la joie est présente dans toute la liturgie de ce troisième dimanche de l’Avent; on y fait une claire allusion dans la prière d’ouverture (aussi appelée « collecte », car elle a pour but de ramasser et de recueillir toutes les intentions de prière que les participants portent dans leur cœur), et on la retrouve aussi dans les lectures bibliques de la messe. Ce dimanche de la joie, mis en plein milieu de l’Avent, est très significatif; c’est comme si l’Église, en pensant à la joie immense du Noël qui vient, ne pouvait contenir la joie qui l’habite dès maintenant et se devait de la faire éclater au grand jour.

Les personnes parmi vous qui fréquentent assidûment mon blogue, savent pourquoi il porte le titre « Dieu ma joie ». J’ai clairement donné la raison de ce fait dans le premier long texte mis sur mon blogue, le 18 juin 2011 (voir la table des matières) et intitulé : « Le désir le plus profond ».

Si je vous écris aujourd’hui, c’est à cause d’un jeune homme nommé Simon Lessard. Simon est Dominicain et étudie présentement la théologie à Ottawa. Il est un des protagonistes du film Alleluia qui a paru sur nos écrans l’an dernier et que j’ai commenté sur mon blogue (pour lire ce texte, cliquez sur les mots suivants : Dieu ma joie: Un vent de fraîcheur). Simon a aussi un blogue (1). L’an dernier à la même date, en ce premier dimanche de l’Avent, Simon avait écrit un texte sur la joie. Cette année, il a récidivé, en ce sens qu’il a donné tout dernièrement un entretien sur la joie chrétienne, intitulé : « Entretien sur la joie chrétienne. Entre dans la joie de ton Maître ! » Hier, en plein dimanche de la joie, Simon a eu la gentillesse de m’envoyer cet entretien par internet. En lisant l’entretien, certains passages m’ont beaucoup touché et j’ai écrit à Simon, pour lui demander la permission de mettre des extraits de son texte sur mon blogue. La permission m’a généreusement été accordée. Voici donc des extraits de « Entretien sur la joie chrétienne. Entre dans la joie de ton Maître ! » :

Les 3 causes de toute joie !

Revenons maintenant à la joie. Qu’est-ce que la joie ? Comment pourriez-vous la décrire à un enfant ? Seriez-vous capable d’en donner une définition ? Je vous en propose une : la joie est l’émotion que nous ressentons quand nous avons connaissance d’être uni à un bien qui convient. Selon cette définition il y a donc 3 causes de la joie. Quelles sont-elles ? 1) Le bien 2) L’union au bien 3) La connaissance de l’union au bien. Si vous voulez avoir plus de joie, il faut miser sur ces trois causes !

1. Le bien. 

Plus le bien est grand objectivement plus la joie sera grande. Un gâteau au chocolat est un petit bien en comparaison de l’autobiographie de sainte Thérèse de l’enfant Jésus, mais ce livre est aussi un plus petit bien qu’un bon ami et le meilleur des amis est encore un bien infiniment moindre que notre amitié avec Dieu. Si vous voulez plus de joie, alors cherchez de plus grands biens, cherchez Le Bien ! « Joie pour les cœurs qui cherchent Dieu. » (Ps 105, 3)

2. L'union au bien.

On peut aussi être plus ou moins unis à un bien. Quand il n’y a pas du tout d’union, il n’y a que du désir. Quand l’union est totale et parfaite, le désir cède la place à la joie pure ! Mais souvent nous sommes unis au bien de telle manière que nous pourrions l’être davantage. Je pourrais être plus uni à mes enfants si je passais plus de temps avec eux. Je serais plus uni à mes amis si je les connaissais mieux. Mon union à Dieu serait plus grande si je cessais de pécher, si je pratiquais les œuvres de miséricorde, si je fréquentais plus souvent et avec plus de ferveur les sacrements, etc. Cherchez à être plus unis au bien et réfléchissez sur les différents modes d’union selon les biens. On n’est pas uni à de la nourriture comme on est unis à de la musique, à une vertu, à la sagesse, à un ami ou à Dieu. 

3. La connaissance de l'union au bien.

C’est là un point trop souvent négligé. Nous avons déjà bien des raisons d’être joyeux, mais nous ne les voyons pas ou nous les oublions trop vite ! Il y a des biens qui sont toujours des raisons de se réjouir comme, par exemple: la vie, les beautés de la nature, des événements heureux du passé, etc. Le plus souvent nous pouvons être joyeux d’être en santé physiquement et psychologiquement, d’avoir tous les biens nécessaires à la vie, pour la paix dans notre pays, etc. Il y a tant de biens que nous avons et nous passons notre temps à voir ceux que nous n’avons pas !
                                                                                           

Comme j’ai dit un jour à un jeune bouddhiste me demandant une parole de sagesse sur la rue Saint-Jean à Québec : « La pire erreur que tu peux faire dans ta vie, c’est de renoncer à être plus joyeux ! »

(Tiré de : Simon Lesssard, Entretien sur la joie chrétienne. Entre dans la joie de ton Maître!) 

(1) Pour accéder directement au blogue de Simon, veuillez cliquer sur les mots suivants: Parole et Lumière

samedi 14 décembre 2013

Comme une maison vide

Comme une maison vide

Georges Madore est un Père Montfortain. Je ne le connais pas personnellement, mais il m’arrive de lire ses commentaires de la Parole de Dieu dans le Prions en Église. Je trouve que cet homme a une façon tout à fait originale de voir et de dire les choses. La prière ci-dessous, qu’il a composée, vous donnera une idée de ce que je veux dire. En ce temps de l’Avent, où nous vivons une ineffable attente, et alors que nous nous apprêtons à vivre le grand signe qui nous est donné, d’un Enfant-Dieu né dans une étable et couché dans une mangeoire d’animaux, je trouve cette prière tout à fait de circonstance.

Me voici comme une maison vide …
Georges Madore, montfortain


Seigneur,
je me présente devant toi
comme une maison vide,
une maison qui attend,
une maison bien pauvre.

Loué sois-tu Seigneur pour cette pauvreté!
Si mon plafond est défoncé,
il peut laisser filtrer la lumière;
si mes murs sont délabrés,
ils peuvent laisser passer ton souffle;
si ma maison est vide,
elle peut t’accueillir.

Seigneur, voici ma maison.
Je te l’offre avec sa pauvreté :
remplis-la de ta présence.
Toi, le Dieu qui pardonne, tu ne dis pas :
« Faites le ménage et je viendrai ! »
Non, tu viens chez moi
et mon désordre ne te fait pas peur.

Viens Seigneur,
depuis si longtemps ma maison t’attend.
Elle sera toujours vide
tant que tu n’y seras pas.

Maranatha :
viens Seigneur Jésus.

Cette idée qu’exprime le Père Madore lorsqu’il dit que « sa maison sera toujours vide tant que le Seigneur n’y sera pas, ne l’habitera pas », m’a fait penser à une strophe d’un poème de Thérèse de l’Enfant-Jésus, intitulé : « Pourquoi je t’aime ô Marie ». Ce poème, écrit au mois de mai de l’année où cette chère sainte est décédée, nous révèle le cœur marial de Thérèse. Est-ce qu’il vous est déjà arrivé, lors d’un mois de mai, de vous asseoir à votre bureau et d’écrire un poème d’amour à la Vierge Marie? Demandez-vous ce que vous lui diriez. Et quelle longueur, environ, aurait votre poème. Thérèse a fait cet exercice à quelques mois de sa mort, alors qu’elle était très malade. Mgr Guy Gaucher, parlant de l'état de santé de Thérèse en mai 1897, disait: "À cette époque, elle a abandonné la vie conventuelle, en ce sens qu’elle ne va plus prier au chœur, ne se rend plus au réfectoire et ne travaille plus. Elle se tient soit dans sa cellule, ou dans le jardin, et elle va bientôt cracher le sang ". Elle a écrit un poème de deux cents vers: vingt-cinq strophes de huit vers. Il faut le faire, n’est-ce pas? Un des spécialistes en mariologie de notre temps, l’abbé René Laurentin, a analysé ce poème et a dit que Thérèse était vraiment en avant de son temps. Il nous dit que Thérèse avait en elle la spiritualité de Vatican II. Sa dévotion mariale était basée uniquement sur la Parole de Dieu. Thérèse n’aimait pas du tout entendre des prêtres prêcher sur la Vierge Marie et dire des choses qu’on ne pouvait pas prouver ou vérifier dans les Évangiles. Son poème « Pourquoi je t’aime, ô Marie », suit pas à pas la vie de la Vierge Marie, dans le récit des évangiles.

À la treizième strophe de son poème, nous ne sommes rendus qu’à la fuite en Égypte. Thérèse nous fait comprendre que la vie en Égypte n’était pas « un exil » pour la Vierge Marie, car Jésus a toujours été sa patrie. Là où était Jésus, c’est là que Marie se sentait chez elle. Le véritable exil, ce fut lorsque Jésus, à l’âge de douze ans, est disparu pendant trois jours, sans que Marie sache où Il était. Ça, c’était « l’exil, dans toute sa rigueur ».

" Sur la terre d’Égypte, il me semble, ô Marie
Que dans la pauvreté ton cœur reste joyeux,
Car Jésus n’est-Il pas la plus belle Patrie,
Que t’importe l’exil,, tu possèdes les Cieux ?…
Mais à Jérusalem, une amère tristesse
Comme un vaste océan vient inonder ton cœur
Jésus, pendant trois jours, se cache à ta tendresse
Alors c’est bien l’exil dans toute sa rigueur! "


Georges Madore exprime la même idée, lorsqu’il dit que notre maison sera toujours vide, tant que Jésus n’y habitera pas.

Pour lire le poème marial de Thérèse, veuillez cliquer sur le lien suivant :

Pourquoi je t'aime, ô Marie - Sanctuaire Sainte-Thérèse de Lisieux  www.therese-de-lisieux.catholique.fr/Pourquoi-je-t-aime-o-Marie.html


lundi 9 décembre 2013

350 ans !

350 ans ! 
Dans la ville de Québec, on vit une année jubilaire en commémoration du 350ème anniversaire de la cathédrale Notre-Dame de Québec, érigée le 15 septembre 1664 (1), par Mgr François de Laval, premier évêque de Québec et d’Amérique du Nord. C’est une occasion de nous rappeler l’importance de la dévotion mariale, dans notre histoire. Le 15 septembre, l’Église célèbre la fête de Notre-Dame-des-douleurs. Le 8 décembre, c’est la Solennité de l’Immaculée Conception. Le 8 décembre 1658, François de Laval est devenu évêque et a été nommé vicaire apostolique de la Nouvelle-France. « À son arrivée à Québec, il érige la première paroisse sous le vocable de l’Immaculée Conception, siège de la première cathédrale. » (Doris Lamontagne, Prier 15 jours avec François de Laval, Nouvelle Cité, 2007, p.32)

Hier soir à 19 heures, en ce dimanche 8 décembre, on inaugurait la porte sainte construite pour l’occasion; la seule porte sainte qui existe en dehors de l'Europe (jusqu'à hier soir, il n'existait que six portes saintes dans le monde: quatre à Rome, une en Espagne et une en France). Environ à la même heure, à Montréal, dans ma chambre, je priais l’office des lectures du jour, c’est-à-dire du deuxième dimanche de l’Avent. La fin de la première lecture, tirée du prophète Isaïe et son répons, m’ont impressionné car j’y voyais une référence évidente à Mgr de Laval et à la porte sainte. À ce moment-là, je ne savais même pas qu'à Québec, on inaugurait la porte sainte; je croyais que l'inauguration aurait lieu le lendemain, le jour de la fête de l'Immaculée Conception (exceptionnellement cette année, nous fêtons l'Immaculée le 9 décembre, puisque le 8 décembre était un dimanche et, qui plus est, un dimanche de l'Avent. Ce dimanche d'un temps fort de l'année, avait préséance sur la solennité de l'Immaculée Conception).  Dans mon esprit, le texte biblique de la première lecture du bréviaire, parlait clairement de Mgr François de Laval; et le répons faisait clairement référence à la porte sainte. Voici les deux derniers paragraphes de la lecture du texte d’Isaïe, suivis du répons :

« En ce jour-là, je ferai appel à mon serviteur, …, je le revêtirai de ta tunique, …, je remettrai ton pouvoir entre ses mains. Il sera un père pour les habitants de Jérusalem (entendre: " de la Nouvelle France ") et pour la maison de Juda .

Je mettrai la clé de la maison de David sur son épaule, il ouvrira et nul ne fermera, il fermera et nul n’ouvrira. Je l’enfoncerai comme un clou dans un endroit solide et il sera un trône de gloire pour la maison de son père. »

R/  Seigneur, ouvre-nous la porte des vainqueurs :
      nous entrerons pour te rendre grâce !

      Voici le Véritable, dit le Seigneur,
      celui qui tient la clef de David :
      j’ai ouvert devant toi une porte
      que nul ne peut fermer.

Je m’émerveille toujours de la façon dont la Providence fait les choses. Oui, Dieu dirige avec énormément de discrétion, le cours des choses et le cours de l’histoire.

Prions pour que cette année jubilaire produise de grands fruits pour notre peuple, ce peuple qui a été tant choyé par Dieu, au long de sa courte histoire. C’est en tout cas le désir de notre cher pape Francois :  

« Le 26 juin 2013, Mgr Gérald Cyprien Lacroix a rencontré le Pape François, lors de son passage à Rome, pour une audience générale post-synodale sur la nouvelle évangélisation. Lors de cette merveilleuse rencontre, le Pape François a dit à Mgr Lacroix: «Souvenez-vous que le Québec a connu de très grands missionnaires au cours de son histoire. Il faut relever le Québec! »

Les fêtes du 350e de Notre-Dame de Québec seront une excellente occasion de « relever » Notre-Québec, mais aussi Notre-Famille et Notre-Foi! Joignez-vous à Notre-Fête et faites partie de Notre-Histoire!"   (Tiré du site internet de la cathédrale de Québec: Notre-Dame de Québec notredamedequebec.org/)

Et quel est le désir de l'archevêque de Québec pour cette année jubilaire? Pour répondre à cette question, rien de mieux que d'entendre Mgr Lacroix nous le dire lui-même en visionnant la vidéo mise sur le lien qui suit. Au début de cette vidéo, Mgr Lacroix nous dit que le jubilé "concerne tous les catholiques et les chrétiens de l'Amérique du Nord puisque Notre-Dame est la première paroisse à avoir été fondée au nord du Mexique et des colonies espagnoles, il y a 350 ans. On estime que plus de 18 millions de personnes habitant actuellement sur le territoire de l'Amérique du Nord, peuvent dire que leur ancêtre a été baptisé ou s'est marié à la paroisse Notre-Dame. C'est donc dire que c'est une célébration pour toute l'Amérique du Nord, parce que c'est le berceau de la foi catholique". Pour visionner la vidéo, veuillez cliquer sur le lien suivant:  Porte Sainte à Québec, entretien avec Mgr Lacroix

Sur le côté extérieur de la porte, Jésus est représenté, grandeur nature. Si on regarde la porte de l’intérieur de la cathédrale, on y voit la figure de la Vierge Marie dans un médaillon, entourée de ses enfants, des enfants de Dieu et de l’Église. Sur les deux faces de la porte, la croix est mise en évidence.

« Il est très important de passer la porte de l'extérieur vers l'intérieur, question de symbolique. «On part de notre vie ordinaire, avec nos préoccupations, pour aller à la rencontre de Dieu », souligne l'abbé Julien Guillot, directeur général des Fêtes du 350e de la cathédrale Notre-Dame-de-Québec. Une fois à l'intérieur, on peut s'agenouiller devant les reliques, qui sont des parcelles d'os des saints du Canada. Un vitrage sera installé dans quelques semaines pour donner plus d'intimité aux gens et leur indiquer aussi qu'une fois sortis de l'enceinte, ils ne peuvent y retourner. On croit qu'environ 250 000 personnes franchiront la porte sainte de Québec au cours de l'année 2014. Et encore, ce chiffre est conservateur parce que les voyagistes américains se montrent déjà très intéressés à y envoyer des touristes. On peut traverser la porte sainte tous les jours pendant un an, soit jusqu'au 28 décembre 2014. Après quoi, elle sera scellée et rouverte seulement quand le pape lui-même en donnera l'autorisation, ce qui devrait être dans 25 ans. » (Patricia Cloutier, Le Soleil, 9 décembre 2013)
 La porte sainte de Québec ouverte à tous | Patricia Cloutier | Société
www.lapresse.ca › Le SoleilActualitésSociété

N.B.  Si vous lisez l'article de Mme Patricia Cloutier (ou si vous visionnez la vidéo), n'allez pas croire que la porte sainte est une porte de réfrigérateur. L'abbé Julien Guillot, responsable du comité organisateur des festivités du 350ème, a corrigé cette information en précisant qu'elle était constituée de deux plaques de bronze fixées à une armature d'acier. Divers produits ont aussi été ajoutés pour constituer un isolant permettant à la porte sainte de faire face à nos hivers rigoureux. 

(1)  Pour connaître ce qu'il y avait comme lieu de culte à Québec, avant 1664, veuillez cliquer sur le lien suivant: Un peu d'histoire : Notre Dame de Recouvrance et la Nouvelle- France www.seminairedequebec.org ›