jeudi 26 septembre 2013

La Charte, deuxième partie

La Charte, deuxième partie

« Oh boy, oh boy! » (expression anglophone employée au Québec pour exprimer l’étonnement). Il est bien vrai que ce débat sur la Charte des valeurs québécoises provoque des remous dans la population. Ce débat a provoqué de vives réactions en moi et, je dois maintenant l’admettre, à cause de moi, en d’autres personnes. J’ai exprimé en chaire, dimanche dernier, ma vision des choses concernant un aspect de la Charte (la section intitulée : « Neutralité religieuse »), et cela a provoqué des remous chez mes paroissiens et dans la société ici à Pointe-aux-Trembles. Deux personnes sont sorties de l’église durant mon homélie, visiblement fâchées par mes propos. Une de ces deux personnes, un homme, est sortie de l’allée centrale de l’église, ce qui ne pouvait pas échapper à mon regard. Mais une autre dame est sortie par l’avant, sur le côté, sans que le sache. Je l’ai su parce que cette dame est venue me voir au bureau en début de semaine pour m’exprimer son indignation. J’ai trouvé cette dame assez exceptionnelle. D’abord, elle a eu la décence de venir se plaindre directement à moi. Elle m’a dit : « J’étais tellement fâchée que si je n’étais  pas venue vous voir, je ne serais peut-être pas retournée dans mon église paroissiale. » Nous avons dialogué, et elle est sortie du bureau le sourire aux lèvres. Nous ne sommes pas d’accord sur certains points, mais nous nous respectons. Voilà un bel exercice de démocratie. Hier, en fin de journée, je recevais un appel du bureau de circonscription de notre députée et ministre provinciale, Mme Nicole Léger, me faisant savoir que des personnes avaient téléphoné chez eux pour se plaindre des propos que j’avais tenus à l’église dimanche dernier et pour vérifier si ces plaintes étaient fondées ou non. J’avoue que si ce sont de mes paroissiens qui ont agi ainsi, je ne considère pas que leur réaction soit aussi honorable que celle de la dame dont je viens de parler.

Ces événements me montrent l’utilité des blogues sur internet. Quelle belle façon d’exercer la démocratie! Un blogue n’est pas une thèse de doctorat; c’est un moyen de prise de parole pour exprimer nos idées, et aussi nos états d’âme. Il est certain que si je présentais certains de mes textes aux grands « quotidiens » de nos cités, je n’aurais pratiquement aucune chance d’être publié. Le blogue me permet de dire ce que pense et ce que je ressens. Il me permet aussi, parfois, de dire tout haut ce que plusieurs personnes pensent tout bas.

Si les hommes et les femmes politiques se permettent de débattre publiquement de questions religieuses, il ne faudrait pas s’étonner que des religieux se permettent de débattre de choses politiques. Et comme pasteur, j’ai une responsabilité vis-à-vis mes fidèles. Je me dois de leur exposer ma façon très concrète de voir les choses. Je n’ai aucun pouvoir sur la pensée et les convictions de mes paroissiens, mais j’ai le devoir de les éclairer sur certaines questions d’ordre moral et religieux. Dimanche dernier, je n’ai qu’affirmé en chaire ce que l’Église a toujours soutenu : la religion ne relève pas seulement du privé, mais aussi du public. La société en général, veut depuis des années reléguer la croyance religieuse au niveau de la vie privée. Cela est une erreur du point de vue religieux et comme pasteur, je me dois de le dire. C’est mon devoir d’enseigner la religion. Or la religion, toute religion, a un caractère à la fois privé et public. Si une personne désire témoigner en public de sa foi, dans le respect des autres, elle devrait pouvoir le faire. Pour une personne qui adhère à une religion, cette adhérence est ce qu’il y a de plus sacré et de plus précieux dans sa vie. Cela, il faut le savoir; et non seulement le savoir, mais aussi le respecter.

Si, en société, on lance le message suivant à une grande partie de la population : « La société pourra vivre en harmonie de 9h à 5h du lundi au vendredi, à condition que tous soient neutres au point de vue religieux. Pas de religion, pas de signe religieux durant les heures de bureau. Oubliez ce qui est le plus important pour vous durant les heures de bureau, ou du moins, n’en témoignez pas, pour un mieux vivre en société », on se prive, selon moi, d’une grande richesse. On se prive de mieux connaître l’autre, on se prive de manifester du respect envers ce qui importe le plus pour les personnes, et on est loin de faciliter le mieux vivre ensemble en dehors des heures de bureau.

Examinons quelles sont nos peurs vis-à-vis l’autre, et demandons-nous si elles sont légitimes et rationnelles.

Voici ce que l'on retrouve dans la section de la Charte, intitulée: « neutralité religieuse »:  

Exemples de signes non ostentatoires qui seraient permis au personnel de l’État:

Une petite croix autour du cou

Exemples de signes ostentatoires qui ne seraient pas permis au personnel de l’État:

Une grosse croix autour du cou

Tiré du lien internet suivant:
Qu'en pensez-vous ?

Ceci étant dit, j’admets que le mieux vivre en société exige des balises en matière de religion. S’il est vrai, comme je l’ai entendu hier, qu’une garderie de notre quartier, ne sert plus de porc aux enfants pour des motifs religieux, alors là il y aurait dérive selon moi, et il faudrait agir pour corriger la situation.

Tout cela n’est pas simple, il est vrai, mais certains principes, selon moi, sont très clairs.    

Il est bon de jeter un coup d'oeil sur la vidéo ci-dessous dans laquelle Mgr Christian Lépine, archevêque de Montréal et Mgr Gérald Lacroix, archevêque de Québec, expriment leurs commentaires sur la partie de la Charte des valeurs québécoises qui porte sur les signes religieux. Une fois que vous aurez cliqué sur le lien ci-dessous, allez sur le Bulletin quotidien SEL + LUMIÈRE   Perspectives: capsule quotidienne, et cliquez sur la vidéo représentant le visage de Mgr Lacroix.

Cliquez sur le lien suivant:
  1. ECDQ.tv: Portail ECDQ www.ecdq.tv/


3 commentaires:

  1. Je trouve assez ironique qu'une membre du gouvernement prônant la laïcité se permette de faire des remontrances à un curé qui a fait "son travail" dans l'enceinte de son église durant la Grand-Messe du dimanche! À ce que je sache, personne n e se fait tordre un bras pour entrer ou sortir de l'église! Assisterons-nous prochainement à l'interdiction de parler de religion dans nos lieux de culte?

    D'un autre côté, Jésus nous met en garde que notre foi ne se témoigne pas seulement qu';a travers des signes religieux ostentatoires. Il faut que le signe le plus visible de la foi d'un chrétien, ce soit la charité, l'amour du prochaine, et même de ses ennemis. Voilà le signe qui distingue, selon moi, le mieux le disciple de Jésus.

    Finalement, j'ai envie de te dire que le fait qu'on ne serve pas de port à la garderie ne me choque aucunement. On ne sert pas, non plus, de beurre d'arachides, de miel, de fruits séchés et d'une multitude d'autres aliments. Saint Paul nous invite à faire preuve de sympathie pour les gens d'autres religions: 1 Corinthiens 8.13
    "C'est pourquoi, si un aliment scandalise mon frère, je ne mangerai jamais de viande, afin de ne pas scandaliser mon frère. " Pour ma part donc, je me garde une petite gêne d'imposer la viande de port en milieu public. Il y a tant d'autres aliments délicieux à savourer!

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    1. Cher Mathieu,

      La personne du bureau de la circonscription de la ministre ne m'a pas fait de "remontrance" comme telle. Elle voulait d'abord et avant tout savoir si c'était vrai ce qui était parvenu à ses oreilles. Il semble qu'on m'ait accusé de choses que je n'ai pas dites. Toutefois, j'ai clairement dit à mon interlocutrice que j'avais parlé très clairement contre la position du gouvernement en ce qui a trait aux signes religieux qui sont considérés comme " ostentatoires " par les auteurs de la Chartre.

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