mardi 20 mars 2012

Béthasda ou l'évangélisation des profondeurs

Béthasda ou l’évangélisation des profondeurs

Aujourd’hui, en ce mardi de la quatrième semaine du carême, la Parole de Dieu nous présente, comme à chaque année, la vertu bienfaisante de l’eau telle que décrite en Ézéchiel (la surabondance de l’eau qui coule du côté droit du temple et qui « assainit tout ce qu’elle pénètre », image du côté droit de Jésus en croix d’où il sortit du sang et de l’eau) et en saint Jean (le malade à la piscine de Béthasda). Depuis quelques années, le nom de Béthasda est associé à l’évangélisation des profondeurs grâce à madame Simone Pacot. Qu’est-ce que l’évangélisation des profondeurs ? Je ne saurais trop vous le dire, mais j’intuitionne qu’il s’agit de laisser la Parole de Dieu pénétrer au plus profond de nous, jusque dans les profondeurs de notre inconscient pour y guérir le plus possible le mal qui nous afflige depuis notre naissance et qui empêche l’eau vive du Ressuscité de couler en nous.
Mon frère Luc est prêtre lui aussi et il est en ce moment en année sabbatique. Ces jours-ci, il suit les sessions mises sur pied par Simone Pacot sur l’évangélisation des profondeurs. Mon frère y a fait des découvertes étonnantes et très révélatrices. Il m’a partagé quelques unes de ces découvertes au téléphone l’autre jour. Ce qu’il m’a raconté m’a fasciné. Ce qui était fascinant, ce n’était pas seulement les découvertes que mon frère a faites, mais la manière dont il les a faites. Pour aller rejoindre l’inconscient, le meilleur moyen n’est pas la parole et encore moins  le discours formel. Il fut demandé à mon frère et aux membres du groupe qui suivent les sessions, de mimer l’épisode de l’infirme guéri par Jésus à la piscine de Béthasda (Jean 5, 1-16). Les intervenants insistèrent : pas de parole; seulement du mime. À première vue, mon frère a trouvé cet exercice pas mal enfantin et il lui a été un peu difficile « d’entrer dans le jeu ». Dès le début du mime un des « acteurs » s’est mis à parler. Tout de suite mon frère s’est mis à penser : « Ça commence bien, c’est déjà raté; il nous fallait garder le silence ». L’homme qui faisait Jésus a passé presque toute la scène assis par terre. Mon frère s’est dit : « Cet homme ne comprend vraiment pas le sens de la scène évangélique; Jésus se présente comme le Maître, l’enseignant et le guérisseur. Pour signifier cela, la position debout serait beaucoup plus appropriée. »
À la fin du mime, chacun s’exprimait sur la façon dont il ou elle avait vécu l’expérience. Mon frère a exprimé sa frustration d’avoir vécu un raté. Mais son idée a vite changé après qu’il eut entendu l’expérience des autres participants. Celui qui faisait Jésus a expliqué son attitude et son comportement de la façon suivante : « Pour Jésus, la seule chose importante, sa seule mission, est de révéler le Père. Quand cela est fait, il s’efface; mission accomplie. » Mon frère a été abasourdi et ébloui par tant de sagesse. À la fin de l’exercice, mon cher frère en est venu à la conclusion suivante : lorsqu’on vit quelque chose avec Jésus, en compagnie de Jésus ou pour Jésus, il n’y a jamais de raté. Et peut-être est-ce pour cela que Jésus a dit à l’infirme de cette scène évangélique de « prendre son grabat et de retourner chez lui ». Quelle phrase étonnante n’est-ce pas ? On se serait attendu à ce que Jésus dise à l’infirme : « Lève-toi, laisse ton grabat et marche ». Eh bien non; Jésus lui dit : « Lève-toi, prends ton grabat et marche. » (Jn 5, 8) N’est-ce pas une indication du fait que notre blessure ou ce qui nous fait souffrir est le lieu de l’action de Dieu, est le lieu où Dieu passe, où Dieu agit, où Dieu habite à demeure. Rien n’est « raté » pour Dieu ! Jésus gardera éternellement la marque des clous dans ses mains et dans ses pieds, ainsi que la blessure à son côté droit.
L’évangélisation des profondeurs revêt toute sa puissance au verset 14, lorsque Jésus, rencontrant quelques heures plus tard l’infirme qu’il avait guéri, lui dit : « Te voilà guéri; ne pèche plus, de peur qu’il ne t’arrive pire encore. » Le pire en nous, c’est le péché. Le nom même de Jésus veut dire « Dieu sauve »; il nous sauve de quoi? D’abord et avant tout du péché.
Bonne fin de carême !